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« Civilisations Noires » : l’Empire du Ghana (IIIe au XIIIe siècle)

Appartenant au trio des grands empires Ouest-Africains aux côtés de l’Empire du Mali et de l’Empire Songhaï, l’Empire du Ghana s’étendait sur un territoire à cheval entre les frontières actuelles du Mali et de la Mauritanie. Découvrez le « pays de l’or », ainsi que décrit par les auteurs de l’époque.

Appelé localement Ouagadou ou Wagadou, soit la « ville des troupeaux » ou « Terre des Wagué », la dénomination de l’Empire fait l’objet de diverses théories, appuyées par une pluralité de sources. Les premières traces écrites de l’Empire du Ghana ont été trouvées dans l’ouvrage Muruj adh-dhahab (Les prairies d’or) de l’encyclopédiste arabe Al-Masudi qui, citant l’astronome Muhammad al-Fazari, évoque le « Ghana, pays de l’or ». Dans sa Description géographique du monde connu, l’historien et géographe arable Al-Bakri pour sa part, indique que « Ghana est le nom que portent les rois de ce peuple ; le nom de leur pays est Awkar qui vient du Soninké « Ôkara » signifiant « Chez nous » ». Dans une certaine acception populaire, le terme de Ghana, viendrait du Soninké nwana et signifierait « héros / guerrier ». Le souverain de l’Empire est appelé « Kaya-Maga », c’est-à-dire « maître de l’or » ou « grand chasseur », selon les interprétations. Hormis son nom, l’Empire du Ghana n’a aucun lien avec le Ghana contemporain. L’ancienne Côte-de-l’Or fut ainsi renommée par Kwame Nkrumah pour convoquer un passé glorieux propre au continent Africain et rompre avec l’assujetissement colonial.

Un Empire prospère d’Afrique de l’Ouest

Fondé par les Soninkés (peuples habitant la bordure méridionale du Sahara), le Royaume du Ouagadou, embryon de l’Empire du Ghana, prit son essor au VIIIe siècle, époque où il devint un carrefour commercial et imposa sa domination sur le commerce de l’or, du sel, de l’ivoire et du fer. L’Empire tirait également des revenus de l’agriculture et de l’élevage.

Selon la tradition matriarcale africaine, l’Empire adopte une succession matrilinéaire, c’est-à-dire que le trône était cédé au premier fils de la sœur du roi (appelée Linguère en Wolof). Le souverain concentre les pouvoirs religieux, militaire et judiciaire. Il est par ailleurs le seul autorisé à posséder des pépites d’or, les marchands devant se contenter de poussière d’or. Cette règle avait l’avantage de permettre au souverain de contrôler le cours du précieux métal.

« Le roi se pare comme une femme, portant des colliers et des bracelets, et quand il s’assoit devant le peuple, il met une haute coiffe décorée d’or et enveloppée dans des turbans de coton fin… Derrière le roi se trouvent dix pages tenant des boucliers et des épées décorées d’or, et à sa droite sont les fils des rois vassaux de son pays portant des vêtements splendides et leurs cheveux tressés d’or. »

Al-Bakri

Selon Al-Bakri, à son âge d’or, l’Empire du Ghana pouvait mobiliser une armée de 200 000 guerriers, parmi lesquels plus de 40 000 archers, des cavaliers et chameliers. Travaillé par les forgerons, le fer de l’Empire servait notamment à la fabrication d’armes et l’or du souverain rémunérait les soldats. L’Empire fonctionnait comme une société stratifiée : les nobles (commerçants, agriculteurs, aristocrates…), les hommes de caste (artisans, griots…) et les esclaves (généralement d’anciens ennemis vaincus ayant échappé à la mort).

Âge d’or et déclin

L’Empire du Ghana connaît son apogée au Xe siècle. Territorialement, il s’agit d’un agrégat de villages qui englobe alors le Royaume du Ouagadou et les régions de Tékrour (ancien État d’Afrique de l’Ouest, correspondant aujourd’hui au Sénégal), de Sasso, du Mandé, de Diarra et les provinces aurifères du Bouré, du Bambouk et Oualata.

Koumbi-Saleh, la capitale de l’Empire se dressait à 322 km au nord de l’actuelle Bamako et abritait 40 000 à 50 000 personnes, principalement issues des populations Soninkés animistes et musulmanes. Les maisons étaient construites à base de briques de boue séchées, de terre pilée, de bois ou de pierre.

« Le roi a un palais et un certain nombre d’habitations en dôme, tous entourés d’une enceinte comme un mur de ville… Autour de la ville du roi se trouvent des bâtiments en dôme, des bosquets et des fourrés où vivent les sorciers de ces gens, les responsables du culte religieux. C’est là que se trouvent leurs idoles et les tombeaux de leurs rois. »

Al-Bakri

L’Empire du Ghana amorce son déclin à partir du XIe siècle. Les historiens attribuent sa chute à plusieurs causes parmi lesquelles, une sécheresse due à une brusque augmentation des températures, des guerres civiles, l’ouverture d’autres routes commerciales concurrentes et des vagues d’invasions. À son crépuscule, l’Empire du Ghana passe successivement sous domination Almoravide, Sosso, avant d’être finalement annexé par Soundjata Keita, fondateur de l’Empire du Mali.

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