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RDC : Kinshasa accuse Apple d’utiliser des « minerais de sang »

L’Etat congolais s’attaque au géant Apple et à l’hypocrisie des multinationales de la tech. La marque à la pomme est accusée d’utiliser des minerais « importés par contrebande » au Rwanda, souvent des « minerais de sang », pillés par des groupes rebelles.

Cette mise en demeure (sommation avant une procédure judiciaire), fera date dans le contentieux qui oppose la République démocratique du Congo aux géants de l’électronique. Ces multinationales profitent de la confusion générée par la présence de groupes armés et la corruption généralisée qui rendent les contrôles difficiles, pour se montrer peu regardantes sur l’origine du coltan qu’elles achètent.

Apple accusé de fermer les yeux sur des violations de droits humains en RDC

« Le Rwanda est un acteur central de l’exploitation illégale de minerais, et notamment de l’exploitation de l’étain et du tantale en RDC. Après leur extraction illégale, ces minerais sont importés par contrebande au Rwanda, où ils sont intégrés dans les chaînes d’approvisionnement mondiales »

Mise en demeure de l’Etat congolais

Dans sa sommation adressée à Apple, l’Etat congolais accuse le groupe Apple d’utiliser dans ses produits des minerais « exploités illégalement », qui proviendraient « de mines congolaises » au sein desquelles « de nombreux droits humains sont violés ». Le document a été adressé cette semaine aux deux filiales d’Apple en France et à la maison mère du groupe aux Etats-Unis.

« Il ressort du dossier » (remis par Kinshasa) « que la société Apple utilise dans ses produits des minerais stratégiques achetés au Rwanda » dont les minerais 3T (étain, tungstène, tantale), ajoutent l’équipe d’avocats engagés par la République démocratique du Congo (RDC). Cette mise en demeure précède le déclenchement formel d’une procédure judiciaire, si la multinationale ne répond pas dans le délai de trois semaines imparti.

Le jeu trouble des multinationales

« Une enquête des Nations unies a révélé que de nombreux comptoirs achètent sciemment du coltan dans des zones contrôlées par des groupes armés et exploitent la distinction entre eux et les négociants pour prétendre ignorer l’origine du minerai […] Les entreprises internationales transportent ensuite le minerai directement vers le pays de destination ou le réexportent via l’Ouganda et le Rwanda vers des installations de traitement à l’étranger », affirme un rapport publié en mars 2022 par l’ENACT, initiative de lutte contre le crime organisé transnational.

Intitulé « Mining and illicit trading of coltan in the Democratic Republic of Congo », le rapport d’ENACT souligne que le Rwanda est la voie privilégiée pour le négoce illicite du coltan. Kigali ne taxe pas les exportations du minerai et permet aux marchandises importées d’être requalifiées « made in Rwanda » à condition de subir une transformation dans le pays avec une valeur ajoutée d’au moins 30%. « Il est donc probable que la majeure partie du minerai exporté du Rwanda soit d’origine congolaise », conclut l’ENACT.

La question de la responsabilité des géants de la tech dans les violations de droits humains en République démocratique du Congo connu un développement judiciaire important aux Etats-Unis. Il y a un mois, la Cour d’appel du district de Columbia a en effet statué en faveur de Google, Apple, Dell Technologies, Microsoft et Tesla, accusés de soutenir le travail des enfants dans les mines de cobalt de la République démocratique du Congo. Ces firmes étaient accusées par un collectif de plaignants représentent 14 victimes anonymes, membres de familles d’enfants tués ou mutilés dans l’effondrement de tunnels de mines artisanales, de complicité avec les fournisseurs dans une entreprise de « travail forcé » en achetant notamment du cobalt, indispensable à la production des batteries lithium-ion utilisées dans l’électronique.    

Teria News

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