« Vous ne verrez jamais de soldats sénégalais en France […] Qu’ils dégagent ! Ils doivent partir ! ». « Nous sommes sur le point de mettre fin à la présence de l’armée française au Sénégal ». Alla Kane, conseiller du Premier ministre Ousmane Sonko dénonce la présence militaire française au Sénégal. Il annonce également une sortie proche du franc CFA.
Si le nouveau couple exécutif sénégalais, formé au lendemain de la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle du 24 mars dernier a, pour le moment, adopté un ton modéré sur la question de la souveraineté monétaire et celle de la présence militaire étrangère, notamment française sur le sol sénégalais, l’entourage des deux hommes montre moins de réserve sur ces sujets.
C’est le cas de Alla Kane, conseiller au sein du cabinet du Premier ministre Ousmane Sonko. Dans un entretien accordé aux médias locaux, l’homme exprime, sans détours, des opinions radicales sur la sortie sénégalaise du franc CFA et la coopération militaire avec la France.
Un remaniement imminent de la présence militaire française
« Nous sommes sur le point de mettre fin à la présence de l’armée française au Sénégal […] Qu’ils partent ! C’est un symbole de souveraineté. Le maintien de cette présence militaire française est un rappel que nous ne sommes pas encore complètement indépendants […] Vous ne verrez jamais de soldats sénégalais en France. Aujourd’hui, nous parlons de souveraineté militaire, alimentaire et numérique. Qu’ils partent ! Ils doivent partir ! »
Dérapage ou sortie de piste contrôlée ? À 88 ans, l’ancien inspecteur des impôts et domaines et figure de la gauche sénégalaise, est connu pour sa verve. Tranchée, la position d’Alla Kane sur la coopération militaire avec la France révèle la matrice idéologique du Pastef. Mais aussi celle du couple exécutif, bien que soumis à un plus grand devoir de réserve.
Sortie du franc CFA d’ici 5 ans
« Le Sénégal a la capacité de quitter le franc CFA et de créer sa propre monnaie avant la fin du premier mandat du Président Bassirou Diomaye Faye […] Nous disposons d’économistes chevronnés capables de concrétiser cette idée. »
Les propos d’Alla Kane traduisent une urgence, à la fois à l’égard de la présence militaire française au pays de la Teranga, et vis-à-vis du franc CFA dont il annonce un calendrier de sortie. Cette dernière pourrait, selon lui, intervenir à la fin du premier mandat de Bassirou Diomaye Faye.
« Tout est possible. Il suffit d’en avoir la volonté. Nous avons tellement habitué les gens à cette monnaie que l’idée même de la quitter est perçue comme catastrophique », reconnait-il, avant de citer les exemples de sortie réussie du CFA. « La France a colonisé le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, le Cambodge, le Vietnam ; tous ces pays ont réussi à créer leur propre monnaie alors que nous sommes toujours en proie à de graves difficultés économiques, en grande partie à cause de cet instrument », ajoute Alla Kane.
Le conseiller du Premier ministre met les pieds dans le plat en abordant frontalement deux sujets sur lesquels Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko sont particulièrement attendus par la base politique du Pastef. Foncièrement panafricaniste, cette dernière rêve d’un alignement du Sénégal sur les pays de l’Alliance des États du Sahel, quitte à rejoindre le groupe créé en septembre 2023 par le Mali, le Niger et le Burkina Faso sur la base d’une solidarité militaire, diplomatique et à terme politique, dans l’optique de la création d’un État fédéral. Ce qui signifierait pour le Sénégal de marquer une rupture avec la CEDEAO.
Toutefois, rien n’indique que l’exécutif sénégalais adhère à ces projections. Les nouvelles autorités ont plutôt exprimé une volonté de sortir du franc CFA de façon concertée, d’abord dans le cadre de la CEDEAO, puis de l’UEMOA. Enfin, en cas d’échec de ces tentatives, Dakar envisagera une sortie unilatérale de ce vestige colonial pour la création d’une monnaie nationale.
Teria News
