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Etats-Unis : Joe Biden en visite à Tulsa pour les commémorations du massacre de 1921

Le président américain s’est rendu mardi à Tulsa dans l’Oklahoma pour commémorer le centenaire du massacre de Greenwood, encore appelé Black Wall Street. En 1921, un groupe de suprémacistes blancs avait réduit en cendres ce quartier de la ville, faisant jusqu’à 300 morts. Personne à ce jour n’a été inculpé et aucune réparation n’a été faite aux descendants.

L’historien Karlos Hill décrit le massacre de Tulsa comme «l’épisode de violence contre les noirs le plus meurtrier de l’histoire des Etats-Unis […] et probablement l’attaque la plus meurtrière à l’encontre d’une communauté de citoyens».

La renommée de sa prospérité s’était répandue dans tous les Etats-Unis. Dans l’histoire de l’Amérique ségrégationniste et encore aujourd’hui, le quartier de Greenwood dans la ville de Tulsa est un phare pour la communauté Afro-américaine. Greenwood demeure une référence de réussite et d’organisation sociale.

Les mobiles : racisme et jalousie

« Je n’oublierai jamais la violence de la foule hargneuse de Blancs lorsque nous avons quitté la maison. Je vois encore des hommes noirs se faire tirer dessus et les corps noirs gisant au sol dans la rue. Je sens encore la fumée et je vois le feu. Je vois encore les commerces noirs être incendiés. J’entends encore les avions nous survoler. J’entends les cris. Je revis le massacre tous les jours. Notre pays oubliera peut-être cette histoire, mais je ne peux pas. « 

Viola Fletcher, survivante du massacre de Tulsa le 19 mai, devant la commission judiciaire de la Chambre des représentants

C’est l’économie solidaire mise en place par les habitants de ce quartier Noir de Tulsa qui leur a permis de sortir de la pauvreté pour faire émerger des classes moyennes, supérieures et des personnes riches en l’espace de 10 ans. Concrètement, les Noirs employés dans les quartiers blancs dépensaient leur solde dans les commerces de proximité tenus par les Noirs. Grâce à cette économie intra-communautaire, les gérants de commerces de Greenwood disposant d’une clientèle fidèle ont pu embaucher des travailleurs Noirs et leur payer des salaires plus justes que ce qu’ils percevaient dans les quartiers blancs de la ville, ces derniers ont ensuite été en mesure d’ouvrir leurs propres commerces. Autrement dit, l’argent de Greenwood, parfois transféré à partir de la communauté blanche, restait à Greenwood. A son apogée, Greenwood possédait 21 restaurants, 30 épiceries, deux cinémas, un centre de santé, une librairie, une bibliothèque, une poste, des écoles, une compagnie de bus et même deux avions. Les habitants de Greenwood ont également mis en place un système de redistribution sociale. Ainsi, les plus nantis cotisaient pour soutenir les moins bien lotis, parfois avec des bourses d’étude. Cette prospérité lui a valu le surnom de Black Wall Street.

Le voisinage blanc palissait de jalousie et fulminait de rage à la vue de l’opulence croissante du quartier de Greenwood. Nombreuses, les représailles ne manquaient pas jusqu’au prétexte qui fit éclater la tension raciale entre les communautés blanches et noires de Tulsa. Le 31 mai 1921, Dick Rowland, un jeune adulte noir âgé de 19 ans, est accusé par le quotidien Tulsa Tribune de tentative de viol sur une femme blanche de 17 ans, Sarah Page. Les faits se sont déroulés la veille. Selon la version la plus partagée aujourd’hui, alors qu’il entrait dans un ascenseur de l’immeuble où il travaillait, Dick Rowland aurait glissé et aurait essayé de se rattraper en agrippant un bras de la jeune femme. Cette dernière se serait alors mise à crier. Le bruit aurait attiré un employé de l’immeuble qui aurait appelé la police en voyant Dick Rowland fuir.

La nouvelle s’est répandue comme une trainée de poudre. Les 31 mai et 1er juin, des Blancs ont tué environ 300 Noirs, brûlé et pillé quelques 1 251 maisons (faisant 10 000 sans abris) et 131 entreprises. Les compagnies d’assurance ont refusé de dédommager les victimes et personne à ce jour n’a été inculpé. La garde nationale a mis fin au massacré et interné 6 000 rescapés dans des camps.

Personne n’a jamais pu prouver la culpabilité de Dick Rowland. Son dossier a même été clos quelques mois plus tard, Sarah Page retirant finalement sa plainte en septembre 1921.

 » Je demande que mon pays reconnaisse ce qui m’est arrivé, les traumatismes et la douleur, les pertes, et je demande que les survivants et les descendants aient la possibilité de demander justice. « 

Viola Fletcher, survivante du massacre de Tulsa le 19 mai, devant la commission judiciaire de la Chambre des représentants 

Réponse de l’administration Biden

Mardi, la Maison blanche a annoncé des mesures d’aide économique à la population afro-américaine de Tulsa, censées faciliter notamment leur accession à la propriété ou la création d’entreprises. Toujours aucune restitution de terre. Joe Biden est le seul président américain à s’être rendu sur les lieux. En amont de celle-ci, le maire de Tulsa, George Bynum, a présenté lundi des excuses formelles pour « l’incapacité de la municipalité à protéger notre communauté en 1921 ».

Un an après les manifestations du mouvement Black Lives Matter suite au meurtre de George Floyd, le massacre de Tulsa ne figure que depuis peu dans les programmes scolaires. Longtemps ignoré, une grande partie des américains ne l’a découvert qu’avec la série Watchmen des studios HBO.

Teria News

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