Réunis en sommet extraordinaire à Accra, dimanche les chefs d’État de la Cédéao ont suspendu le Mali de ses institutions. Une conséquence directe du second coup d’État du colonel Assimi Goïta. L’organisation régionale appelle également « à la nomination immédiate d’un premier ministre issu de la société civile ».
La sanction était inévitable après le putsch du 24 mai. À l’issue d’un sommet extraordinaire tenu à Accra dimanche 30 mai, la Communauté Economique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a suspendu le Mali de ses institutions.
« Après de longues discussions, les chefs d’Etat et de gouvernement ont décidé de suspendre le Mali des institutions de la Cédéao« , annonce le communiqué final.
Dans le même document, l’organisation appelle également « à la nomination immédiate d’un premier ministre issu de la société civile ». Un contre-poids à la prise de contrôle militaire de la transition, suite à la déclaration par la Cour constitutionnelle d’Assimi Goïta comme chef de l’État et président de la transition malienne, vendredi 28 mai. Par ailleurs, la Cédéao exige du Mali le respect du calendrier de transition, en particulier de l’élection présidentielle prévue se tenir en février 2022.
Une sanction diplomatique mais pas économique
Elles sont de loin celles que les maliens redoutaient le plus. Après le coup d’État du 18 août, la Cédéao avait fermé ses frontières terrestres avec le Mali, provoquant une chute de 30 % des importations du pays, avant que les sanctions ne soient levées en octobre. Mais l’institution n’a cette fois fait état d’aucune sanction économique contre le régime malien. Signe que l’organisation préfère l’inclusion et le dialogue.
À cet égard, cette décision revêt un double enseignement. D’une part, en s’abstenant d’exiger d’Assimi Goïta qu’il renonce à la présidence, un point sur lequel l’institution s’était pourtant montrée intransigeante lors du premier putsch, la Cédéao refuse de punir le régime. Ainsi, l’organisation prend acte et entérine implicitement ce second coup d’État. Les chefs d’État et de gouvernement ont eu à cœur de privilégier la stabilité du pays et de la région, en préférant continuer à composer avec des acteurs qu’ils connaissent plutôt que d’encourager un nouveau cycle d’instabilité politique.
D’autre part, la posture de la Cédéao, dirigée par le président Ghanéen Nana Akufo-Addo, est en rupture nette avec celle de Paris. La France qui, au lendemain du putsch du 24 mai avait annoncé des sanctions, non seulement de sa part, mais également de la part de pays africains, se trouve isolée.
Camouflet pour la France après ses menaces de retirer les troupes françaises du Mali
Le contre-pied de la Cédéao vis-à-vis de Paris est d’autant plus retentissant que le jour même, dans une interview, le président Français Emmanuel Macron a agité la menace d’un retrait des 5 100 soldats français de l’opération Barkhane, disant ne pas vouloir rester « aux côtés d’un pays où il n’y a plus de légitimité démocratique ni de transition« .
Le communiqué de la Cédéao sonne comme un désaveu pour la France qui voulait pousser les États de la sous-région à adopter une ligne dure à l’égard du Mali. Pas de caisse de résonnance, un signe d’espoir dans le sens d’une souveraineté régionale ? Les chefs d’État de la Cédéao ont en tous cas montré plus de scrupules que la France à condamner au Mali ce que la Françafrique a validé au Tchad.
Teria News