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Londres autorisé à déporter ses demandeurs d’asile au Rwanda

Malgré le tollé international, le Royaume-Uni reçoit le feu vert de la Haute Cour de Londres pour expulser ses demandeurs d’asile au Rwanda. Un précédent qui consacre le statut d’indésirable des réfugiés et les légendes urbaines propagées à leur encontre. Il pourrait aussi faire jurisprudence en Europe.

Jugée cruelle et inhumaine par le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU, la nouvelle politique migratoire de Londres à l’égard des demandeurs d’asile vient de recevoir le quitus de la justice britannique. Lundi, le gouvernement de Rishi Sunak, successeur de l’éphémère Liz Truss au 10 Downing street, a été autorisé à poursuivre la très décriée réforme initiée par le cabinet de Boris Johnson.

Dans un paysage politique caractérisé par une instabilité historique liée au déficit de leadership au sein du parti conservateur, les Tories semblent avoir trouvé en cette politique migratoire un des seuls traits d’union entre une famille politique écartelée. Si le jeu de chaises musicales à la tête du parti conservateur et le bal de Premiers ministres aux commandes de l’exécutif nuit gravement à la continuité et la cohérence de l’action publique, en particulier alors que l’économie britannique amorce une phase de récession liée à l’inflation galopante, dans ce chaos, les Tories ont choisi de faire de la lutte contre l’immigration clandestine, à laquelle sont associés les réfugiés, un point de repère et le fondement de leur légitimité post Brexit.

Un projet décrié par les défenseurs des Droits de l’Homme

Le projet d’expulser les demandeurs d’asile au Rwanda le temps que leur dossier soit traité a été jugé « légal » par la Haute Cour de Londres. Une politique pourtant préoccupante sur le fond comme sur la forme. Sur le fond d’abord, la juridiction britannique s’est opposée à la Cour européenne des Droits de l’Homme qui avait annulé un premier vol en juin.

« La Cour a conclu qu’il est légal pour le gouvernement britannique de mettre en place des dispositions pour envoyer des demandeurs d’asile au Rwanda et que leur demande d’asile soit examinée au Rwanda plutôt qu’au Royaume-Uni »

Haute Cour de Londres, 19 décembre 2022

La Cour estime de plus, que la politique de Londres ne s’inscrit pas en violation de la Convention de Genève (1951) relative au statut des réfugiés. Ce, alors que le texte consacre le principe de non-refoulement selon lequel, un réfugié ne devrait pas être renvoyé dans un pays où sa vie ou sa liberté sont gravement menacées, en principe fondamental.

Sur la forme, avec l’aval de la justice, le gouvernement britannique peut donc poursuivre cette politique migratoire, exécutée en partenariat avec le Rwanda. Une coopération qui pose de nombreuses questions éthiques. Rappelons en effet que le pays est régulièrement dénoncé dans les rapports des organisations de défense des Droits humains comme violant les libertés fondamentales et accusé de mener des représailles contre les opposants au régime sur son sol comme à l’étranger. Kigali est encore accusé par l’ONU et Kinshasa de financer et armer les rebelles du M23 qui sèment la mort et la désolation à l’est de la RDC pour déstabiliser le pays aux fins d’en piller les ressources minières.

Les réfugiés, victimes de légendes urbaines

La réforme migratoire de Londres dans le traitement des demandeurs d’asile franchit une limite, marquant le rejet des refugiés par les puissances publiques occidentales, en partie validé par des opinions publiques souvent manipulées par des représentations déformées, aussi xénophobes qu’inhumaines de l’impact de la présence des réfugiés.

Pourtant, ces derniers ne représentent pas des hordes sales et miséreuses lancées à l’assaut des côtes européennes, déterminées à perturber la paix et l’harmonie sociale de l’Occident. « Beaucoup de ces gens qui viennent, viennent par nécessité, et aussi franchement parce qu’ils ont quelque chose à donner. Ils ne viennent pas les mains vides », estime Abdulrazak Gurnah, prix Nobel 2021 de littérature. De façon globale, la migration régulière représente 80% des flux migratoires. Autrement dit, sur 10 migrants, seuls 2 le font de façon irrégulière. Rappelons également que loin d’être des fardeaux pour leurs pays d’accueil, bien que ne représentant que 3,4% de la population mondiale, les migrants contribuent à hauteur de 9,4% au PIB mondial (McKinsey).

Par ailleurs, bien que 45 000 migrants soient arrivés illégalement sur les côtes anglaises en 2022, contre 28 526 en 2021, rappelons que, de façon globale, la migration régulière représente 80% des flux migratoires. Autrement dit, sur 10 migrants, seuls 2 le font de façon irrégulière. Rappelons également que loin d’être des fardeaux pour leurs pays d’accueil, alors qu’ils ne représentent que 3,4% de la population mondiale, les migrants contribuent à hauteur de 9,4% au PIB mondial. Enfin, le précédent de Londres devrait faire jurisprudence en Europe. D’ores et déjà, le Danemark fait montre d’un intérêt pour le modèle britannique.

Teria News

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