AfriquePolitique

Tensions entre le Burkina Faso et le Ghana autour de Wagner

« Le Burkina Faso a trouvé un arrangement pour (…) employer les forces de Wagner sur son territoire. Je crois qu’une mine dans le sud du Burkina leur a été allouée comme forme de paiement », affirme le président ghanéen. Entre convocation et rappel d’ambassadeurs, précisions.

À Washington, en marge du sommet États-Unis / Afrique, le président ghanéen a, semble-t-il, jeté un pavé dans la mare. Nana Akufo-Addo s’est inquiété de la présence des forces du groupe russe de sécurité privée Wagner au sud du Burkina Faso, à la frontière nord de son pays, sans toutefois appuyer ses déclarations avec des preuves.

« Avant tout, il y a un sujet que je veux mettre sur la table de manière urgente. Aujourd’hui, les mercenaires russes sont à notre frontière nord. Le Burkina Faso a trouvé un arrangement pour suivre le Mali et employer les forces de Wagner sur son territoire. Je crois qu’une mine dans le sud du Burkina leur a été allouée comme forme de paiement pour leur service. Le Premier ministre du Burkina Faso a été à Moscou au cours des dix derniers jours. Et avoir ces mercenaires qui opèrent juste de l’autre côté de notre frontière est particulièrement pénible pour nous au Ghana. »

Nana Akufo-Addo, président ghanéen

Tensions diplomatiques entre voisins

« En plus de ne pas accepter de voir les grandes puissances faire à nouveau de l’Afrique leur théâtre d’opération, nous avons aussi eu une position claire à propos de la guerre en Ukraine : nous avons régulièrement condamné publiquement l’invasion par la Russie. Alors, avoir ce groupe à notre frontière est un sujet de grande inquiétude pour nous. Et je voudrais que cette discussion se poursuive : dans quelle mesure nous pouvons vous avoir comme partenaire pour faire face à ce danger ? C’est très important », a poursuivi Nana Akufo-Addo. Dans la foulée des déclarations du chef d’État ghanéen, tenues en présence du Secrétaire d’État américain Antony Blinken mercredi, mais rapportées par la diplomatie américaine jeudi, l’ambassadeur du Ghana au Burkina Faso a été convoqué au ministère des Affaires étrangères burkinabè ce vendredi. Une « audience urgente » doublée par Ouagadougou du rappel de son ambassadeur à Accra pour « consultation ».

La sortie de Nana Akufo-Addo intervient alors que, confronté à une grave crise économique, le président ghanéen fait face à une vive contestation populaire et politique interne. L’inflation galopante, le tarissement des devises du pays et son niveau d’endettement l’ont contraint à solliciter l’appui du FMI qu’il s’était pourtant engagé à tenir hors de la gouvernance économique d’Accra. Au Ghana comme sur le reste du continent, ce revirement est interprété comme un symbole de renoncement à l’ingérence occidentale de la part d’un dirigeant qui s’était fait le chantre de la souveraineté africaine. Affaibli sur le plan interne, le président ghanéen soigne ainsi ses relations avec les bailleurs occidentaux.

La tentation sahélienne de Wagner en question 

L’arrivée au pouvoir d’Ibrahim Traoré et sa volonté affichée de se tourner vers de « nouveaux partenaires » dans sa riposte sécuritaire a ravivé le spectre occidental de la présence du groupe paramilitaire russe Wagner dont la présence sur le continent cristallise un regain dans la lutte d’influence entre grandes puissances, mais aussi les tensions entre l’Occident et la Russie dans le contexte du conflit russo-ukrainien. Une crainte accentuée par l’offre de service, formulée dans la foulée du coup de force du 30 septembre, par Evguéni Prigojine. À la tête du groupe de sécurité, l’homme de l’ombre du Kremlin a apporté son soutien au jeune capitaine et ses compagnons d’arme qui, selon lui, ont « fait ce qui était nécessaire (…) pour le bien de leur peuple ». Toutefois, jusqu’ici, Ouagadougou a centré sa stratégie sur le recrutement de « volontaires pour la patrie », sans se montrer ouvert à l’option d’un éventuel recours au groupe de mercenaires lequel, s’il s’avérait, relèverait de l’exercice de sa souveraineté.

Teria News

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page