Dénonçant des « farces judiciaires », Ousmane Sonko cité dans deux dossiers pouvant lui coûter son éligibilité en vue de 2024, appelle à la « désobéissance civile contre la justice ». Le premier opposant à Macky Sall rejette également tout dialogue avec le président sénégalais qui parvient à l’isoler au sein de la coalition Yewwi Askan Wi.
Ce mois de mai est celui de tous les dangers pour Ousmane Sonko. Le président du Pastef devra en effet répondre de ses actes devant la justice sénégalaise pour deux affaires. La première, en appel pour diffamation contre le ministre du Tourisme qui lui avait certes valu 2 mois de prison avec sursis et une amende de 200 millions de francs CFA de dommages et intérêts, mais avait surtout épargné les droits civiques et politiques de l’opposant, le maintenant ainsi dans la course à la présidentielle. La seconde, pour viol contre l’employée d’un salon de massage de Dakar. Alors que ces deux dossiers, dont les audiences sont prévues se tenir respectivement les 8 et 16 mai prochains, pourraient lui coûter son éligibilité en vue de 2024, le maire de Ziguinchor appelle à la « désobéissance civile contre la justice ».
La désobéissance civile, rempart contre une éventuelle condamnation ?
« La justice nous a fait trop de mal. Nous avons décidé d’engager une campagne de désobéissance civile vis-à-vis de cette justice. Parce que quand une justice est injuste, nous n’avons plus l’obligation de la respecter et a fortiori d’accepter de jouer son jeu. »
Ousmane Sonko, lundi 1er mai
S’estimant « persécuté par la justice », Ousmane Sonko sentirait-il le vent tourner en sa défaveur ? La « désobéissance civile » serait alors pour l’opposant, le moyen de contrer une ou deux éventuelles condamnations judiciaires. Au nom de l’instrumentalisation de la justice par le régime de Macky Sall, le président du Pastef la condamne comme illégitime. Arguant de la dualité opposant parfois légalité à légitimité, lorsqu’à certaines périodes de l’histoire les pouvoirs législatif et judiciaire ne répondent plus aux exigences d’équité et de justice, Ousmane Sonko invoque le droit à la désobéissance civile, arme ultime contre des régimes iniques mobilisée avant lui par Gandhi, Martin Luther King ou Nelson Mandela sous l’inspiration de Henry David Thoreau et Léon Tolstoï.
Par ailleurs, dans ce contexte d’affrontement par tribunaux interposées, Ousmane Sonko rejette l’appel au dialogue lancé par Macky Sall le 21 avril. Dans une interview donnée à la radio à l’occasion de la fête de l’Aïd, le président sénégalais avait, une nouvelle fois, invité les forces politiques à la table des discussions. Perche tendue ou piège ? Alors que Khalifa Sall et le PDS de l’ancien président Abdoulaye Wade, pourtant membres de la coalition d’opposition Yewwi Askan Wi ont accepté le dialogue, le leader du Pastef lui, a tranché. « Pour le peu qu’on en sait, sous ce format actuel, c’est un appel au dialogue pour liquider et isoler Ousmane Sonko et le Pastef, pour casser l’opposition en donnant un bonbon à chacun. C’est un dialogue pour valider une troisième candidature anticonstitutionnelle. Notre génération ne peut pas entrer dans ce deal-là, jamais ! », a-t-il estimé.
Coalition contre un troisième mandat de Macky Sall
Son appel au dialogue aura réussi à casser la dynamique unitaire de l’opposition sénégalaise à la veille d’un scrutin présidentiel sous haute tension, électrisé par une possible candidature de Macky Sall à un troisième mandat. Une élimination d’Ousmane Sonko par la justice débarrasserait ses adversaires et « camarades » membres de l’opposition, du champion de la jeunesse sénégalaise face auquel ils n’auraient eu que peu de chances et dès lors, ouvrirait un boulevard à leurs ambitions présidentielles face à un Macky Sall impopulaire. Grillé par ses velléités, non assumées, de briguer un troisième mandat, il ne reste au président sénégalais que la possibilité de choisir lui-même son adversaire, voire son successeur.
En effet, le 16 avril dernier, plus de cent organisations politiques et de la société civile ont lancé le « Mouvement des forces vives du Sénégal F24 », soit une coalition pour faire barrage à un éventuel troisième mandat du président Macky Sall. Une piqure de rappel pour le président sénégalais, pourtant principal bénéficiaire de la mobilisation de 2012 contre les ambitions similaires de son prédécesseur Abdoulaye Wade qui, avait dû y renoncer.
Teria News