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Sommet de Paris sur la dette africaine : Emmanuel Macron convoque les chefs d’Etat africains pour les « sauver du marasme de la dette »

Mardi 18 mai, Emmanuel Macron au chevet des économies africaines ? La France, qui se considère toujours comme la puissance tutélaire de son ancien pré carré, veut « faire profiter l’Afrique » de DTS, un instrument de change qui permet de financer les importations. Encore de l’argent qui s’appelle « reviens ! » et qui, au lieu d’aider le continent, enrichit les économies industrialisées au détriment du commerce intra africain.    

Un « New Deal » pour l’Afrique ? Rhétorique et communication. La référence historique au programme de reconstruction mis en œuvre par Franklin Delano Roosevelt pour redresser l’économie américaine après la Grande dépression engage des sommes et une volonté politique dont Paris ne peut se prévaloir face à ses propres défis. En effet, il est projeté que sa propre dette publique qui atteint 98.1% de PIB en 2019, grimpe à 118% en 2021. Le Trésor français aux abois se soucie des caisses publiques africaines et dans un élan de générosité enclenche un mouvement d’aide aux pays du continent ?

Droits de tirage spéciaux un mécanisme pervers de dépendance économique

Officiellement, le sommet sur la riposte économique en Africaine, durement frappée par la pandémie avec une première récession en vingt-cinq ans et un recul de 2,1 % de croissance, visait à créer les conditions financières d’une relance économique. De plus, il s’agissait de résorber l’écart mondial qui résulte du financement déséquilibré de la relance économique entre le Nord et le Sud, les pays développés ayant engagé des sommes plus lourdes que les « pays les moins avancés ». Les économistes s’attendent à un retour de la croissance en 2022, mais mettent en garde sur une croissance à deux vitesses entre le Nord et le Sud, ce que l’Élysée a appelé risque de « divergence ».

En plus de mobiliser 100 milliards pour l’Afrique d’ici la fin de l’année, la France propose de faire profiter l’Afrique de droits de tirage spéciaux (DTS) du Fonds monétaire international, des instruments de change qui permettent notamment de financer des importations. Le FMI devrait décider en juin une émission massive de DTS de 650 milliards de dollars, dont 34 milliards pour l’Afrique (24 milliards pour l’Afrique subsaharienne). « Ces montants ne seront pas suffisants. Nous réfléchissons à la manière d’utiliser des DTS des pays avancés pour les pays à bas revenu », a déclaré la présidence française, suggérant aussi une vente de l’or du FMI pour alimenter des prêts à taux zéro aux pays africains. Paris a également invité les créanciers de l’Afrique pour convenir d’un « allègement de la dette ».

Si ce sommet est consacré à l’Afrique, pourquoi ne reçoit-elle que 34 milliards sur 650 ? Par ailleurs, les DTS sont des mécanismes permettant le financement des importations. Ainsi, les pays africains qui en bénéficieront se verront accorder un crédit pour acheter des produits étrangers, ce qui aura pour conséquence d’accroitre la dépendance du continent vis-à-vis de l’extérieur tout en enrichissant encore plus les pays industrialisés à qui est accordée une plus grande ouverture sur les marchés africains. En somme, de l’argent qui s’appelle « reviens ». Ce, alors que l’Afrique s’efforce de sortir de la servitude de l’économie d’importation en misant sur des politiques d’industrialisation et en renforçant le commerce intra africain, notamment par le biais de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (Zlecaf) entrée en vigueur en janvier 2021.

En outre, ce qui aurait dû être à l’ordre du jour du sommet du 18 mai, c’est la problématique des flux financiers illicites dont l’Afrique est victime. Selon la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), sur la base des données examinées entre 2010 et 2018, le continent a perdu annuellement l’équivalent 88,6 milliards dollars par an sur les transactions commerciales. Largement de quoi financer la dette et les politiques publiques. Or, 82% de ces échanges commerciaux, se font avec des partenaires extérieurs et principalement les pays européens.

L’Afrique, le faire-valoir éternel de l’impérialisme français ?

En perte d’influence dans le monde et sur le continent, la France multiplie les initiatives et les artifices pour redorer son blason international. Pour ce faire, quoi de mieux que le défilé de chefs d’Etat africains se succédant sur le perron de l’Elysée pour serrer la main d’Emmanuel Macron ? Paris raffole de type de tableau exhibant sa puissance au monde et à ses rivaux en Afrique que sont la Chine et les Etats-Unis. Toutefois, les apparences sont trompeuses et peu sont aussi dupes que la France de toute évidence ne le pense. En effet, la fracture entre les élites africaines que représentent ces chefs d’Etat et leurs populations est consommée. En d’autres termes, leurs réponses à ces convocations régulières de l’Elysée sont de plus en plus réprouvées par les peuples, en particulier depuis la « Convocation de Pau » de janvier 2020.

Le vent tourne à mesure que les esprits s’éveillent à la géopolitique et aux mécanismes sans cesse recyclés de la Françafrique. L’Afrique qui monte à Paris à chaque mouvement d’humeur de l’Elysée est une Afrique décrépie et en voie de disparition.

Teria News

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