« Amadou Ba m’a donné un milliard alors qu’il m’en avait promis 10 ». Grand déballage de Adama Faye. Le beau-frère de Macky Sall évoque une rétro-commission d’un milliard de francs CFA sur un marché public donnée par Amadou Ba à Macky Sall. Révélations sur la corruption au plus haut niveau de l’État sénégalais.
Dans le contexte d’une campagne violente, marquée par des incidents tels que la double attaque d’un convoi du Premier ministre Ousmane Sonko ou la dégradation des bureaux dakarois de la coalition d’opposition Samm Sa Kaddu du maire de Dakar, Barthélémy Dias, la sortie médiatique de Adama Faye a ajouté de l’huile sur le feu des accusations de corruption qui pèsent déjà sur la gouvernance Macky Sall.
Invité de l’émission « Grandes Gueules » sur SENTV, le beau-frère de l’ancien président a décrit des pratiques de corruption ayant cours sous l’ancien régime et impliquant plus particulièrement Macky Sall lui-même et son ancien Premier ministre Amadou Ba. Selon Adama Faye, un contentieux sur le montant d’une rétro-commission sur un marché public devant revenir à Macky Sall serait au cœur du divorce entre les deux hommes, acté par le lâchage d’Amadou Ba par l’ancien chef d’État et son camp en pleine campagne présidentielle. L’impopularité et la solitude d’Amadou Ba au sein de son propre parti ont été un facteur de division affectant ses performances dans les urnes à l’issue du scrutin du 24 mars dernier. Désavoué, l’ancien Premier ministre a depuis quitté l’APR et lancé son propre parti.
« Amadou Ba m’a donné un milliard alors qu’il m’en avait promis 10 »
« Je vous dis tout ce que je sais sur le différend entre Amadou Ba et Macky Sall. Tout repose sur l’argent. Leur seul problème est l’argent. Si tu es un président qui a l’intention de faire des malversations financières, si tu vois un ministre plus avide en argent et plus voleur que toi, tu ne seras pas d’accord. Je défie quiconque de me démentir. C’est Macky Sall qui me l’a dit en personne », a lancé Adama Faye.
Avant 2020, a-t-il ajouté, « Il y avait un homme d’affaires étranger qui avait gagné un marché, mais n’a pas honoré sa promesse. Il devrait être poursuivi, mais personne ne l’a fait. J’entendais les gens dire ça, mais je ne le croyais pas. Cet homme dont je vous parle me devait de l’argent, je lui avais fait un service privé. Un jour, j’ai entendu qu’il est dans un hôtel de la place. Je me suis dépêché sur les lieux pour lui demander mon dû. Il m’a payé, mais après il m’a remis une montre que je devrais remettre à Macky Sall. En ce temps-là, je n’avais pas de problème avec Macky Sall. Lorsqu’il m’a remis la montre, je lui ai demandé s’il ne l’avait pas truquée. Il m’a dit non, Macky, c’est mon ami ». Avant de poursuivre : « Après, je suis allé chez Macky Sall à qui j’ai dit que tel t’a donné une montre, mais ça dans ma voiture, je crains qu’il l’ait truquée. Macky Sall m’a répondu non, lui, c’est mon ami, il ne va pas faire ça. Je lui ai donné la montre. Après, il m’a demandé si je pouvais rencontrer encore la personne dont je parle. Je lui ai répondu oui. Il m’a dit, vas lui demander combien il a donné à Amadou Ba. »
« Amadou Ba m’a donné un milliard alors qu’il m’en avait promis 10. J’ai quitté son domicile sans repartir là-bas parce que je sais que cet argent n’est pas licite. C’est l’argent du contribuable. Lorsqu’il m’a dit cela, j’ai pensé à cheikh Yérim Seck qui disait qu’il y a des personnes qu’on a octroyé des marchés et qui n’ont pas honoré leurs promesses, mais n’ont pas été suivies », a fait savoir Adama Faye.
Pratiques de rétro-commission courantes dans l’attribution de marchés publics
Adama Faye est ensuite revenu sur un autre épisode entre Amadou Ba et Macky Sall laissant entendre des intimidations mutuelles entre les deux hommes. « Un jour le président Macky Sall avait envoyé un émissaire chez Amadou Ba pour lui dire qu’il fasse attention, car j’ai ses dossiers. » En réponse, Amadou Ba aurait rétorqué : « Va lui dire que j’ai moi aussi ses dossiers », affirme Adama Faye à qui il aurait été reproché de ne pas se montrer suffisamment généreux dans les rétro-commissions traditionnellement concédées par les hommes d’affaire suite à l’attribution de marchés publics : « Un jour, un ministre m’a dit que ton gendre, là, ne donne pas assez d’argent quand il gagne un marché. »
Troublantes, ces révélations sont d’autant plus accablantes que lors d’une conférence de presse tenue le 26 septembre dernier, le Premier ministre Ousmane Sonko s’était livré à une séance de reddition de comptes au cours de laquelle l’ancien régime a été accusé de détournements massifs affectant les comptes publics du Sénégal, désormais dans le rouge. Les résultats de ces audits et leurs conséquences, soit la traduction en justice des responsables publics concernés, dont Macky Sall lui-même, sont un enjeu majeur de cette campagne en vue des législatives anticipées du 17 novembre prochain.
Teria News