Clap de fin pour la Minusma. Ce vendredi au Conseil de sécurité de l’Onu, le Mali a officiellement demandé le « retrait sans délai » de la force onusienne de son territoire.
La rupture entre Bamako et la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (Minusma) couvait depuis plusieurs mois. Plusieurs mois pendant lesquels la division des Droits de l’Homme de la mission onusienne de paix s’est faite particulièrement critique sur la gouvernance des autorités maliennes de Transition en la matière, spécifiquement dans le cadre de la lutte antiterroriste. Une instrumentalisation des Droits de l’Homme visant à discréditer le pivot stratégique opéré par le Mali depuis la prise de pouvoir du colonel Assimi Goïta, notamment matérialisé par le rapprochement avec la Russie et la société de sécurité privée Wagner, dénonce pour sa part Bamako.
Moura, ou la goutte d’eau qui fit déborder le vase
Le bras de fer entre le Mali et la « communauté internationale » sur le théâtre de la guerre communicationnelle a franchi un nouveau palier vendredi 12 mai. La publication d’un rapport du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme sur les évènements de Moura, survenus en mars 2022, a jeté un nouveau froid entre les autorités maliennes de Transition et l’institution.
Accablant et établi sur la base d’une enquête diligentée par la division des Droits de l’Homme de la Minusma, le document accuse l’armée malienne et des combattants « étrangers » d’avoir exécuté au moins 500 personnes lors d’une opération antiterroriste dans ce village situé au centre du pays.
Crise de confiance et de crédibilité
Ce vendredi 16 juin, alors que les membres du Conseil de sécurité de l’ONU doivent se prononcer le 29 juin sur un renouvellement du mandat de la mission de maintien de la paix (qui expire le 30 juin), le ministre malien des Affaires étrangères a officiellement formulé une demande de retrait de la Minusma.
« Le gouvernement du Mali demande le retrait sans délai de la Minusma. Cependant, le gouvernement est disposé à coopérer avec les Nations unies dans cette perspective […] Le réalisme impose le constat de l’échec de la Minusma dont le mandat ne répond pas au défi sécuritaire […] La Minusma semble devenir une partie du problème en alimentant les tensions communautaires exacerbées par des allégations d’une extrême gravité et qui sont fortement préjudiciables à la paix à la réconciliation et à la cohésion nationale du Mali […] Cette situation engendre un sentiment de méfiance des populations à l’égard de la Minusma et une crise de confiance entre les autorités maliennes et la Minusma »
Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères
« Le Mali est parfaitement conscient que la lutte contre le terrorisme ne fait pas partie de la doctrine des Opérations de paix des Nations Unies, mais il avait toujours plaidé pour un changement de posture de la Minusma afin de lui permettre de s’acquitter convenablement de son mandat et d’asseoir des actions de soutien aux efforts du Gouvernement », a par ailleurs ajouté le diplomate avant de regretter que « Ni les propositions du secrétaire général, encore moins le projet de résolution en cours de négociation par les membres de ce Conseil, n’apportent de réponse appropriée aux attentes des Maliens. Ce projet de résolution conforte la récusation de la France en tant que porte-plume tant son contenu est hostile au Mali ».
Après les retraits successifs de Barkhane, Takuba et du G5 Sahel en 2022, le retrait de la Minusma s’inscrit dans la dynamique souverainiste et endogène enclenchée par les autorités de Transition. Déployée au Mali depuis 2013, la force onusienne compte plus 15 mille hommes. Son maintien était déjà en péril, plusieurs pays dont la Suède et l’Allemagne ayant déjà, ces derniers mois, annoncé le retrait de leur contingent respectif.
Teria News