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Le Burkina Faso pourrait « interroger » les accords de coopération avec la France

Ouagadougou est prête à « interroger véritablement, la coopération entre la France et le Burkina Faso », selon le porte-parole du gouvernement burkinabè. La déclaration choc d’Ousseni Tamboura intervient après le blocage d’un convoi militaire français et alors que la colère gronde contre Roch Marc Christian Kaboré.

Le gouvernement burkinabè est dos au mur. Depuis l’arrivée au pouvoir du président Roch Marc Christian Kaboré, la situation sécuritaire du pays ne fait qu’empirer. Aujourd’hui, malgré les bases militaires de l’opération Barkhane et le matraquage politique autour du G5 Sahel, les rebelles occupent quasiment un tiers du territoire national burkinabè.

Après son élection en 2015, Roch Marc Christian Kaboré a entamé une opération de nettoyage des forces de sécurité, par peur que celles-ci, toujours influençables par des fidèles de Blaise Compaoré, ne déstabilisent son régime. Ainsi, presque tous les officiers généraux et supérieurs qui ont servi sous son prédécesseur ont été mis à la retraite. Cette purge de l’appareil sécuritaire burkinabè l’a fragilisé face à la menace terroriste. De plus, Roch Marc Christian Kaboré a connu cinq chefs d’état-major depuis son arrivée au pouvoir, un turnover qui, en plus de traduire une défiance entre l’exécutif et l’armée, a sapé la stratégie militaire contre les terroristes. Si le président burkinabè accuse son prédécesseur de tirer les ficelles depuis la Côte d’Ivoire voisine, en manipulant des groupes terroristes qui étaient auparavant sous son contrôle, l’esprit revanchard de Blaise Compaoré, ses réseaux et son argent ne peuvent à eux seuls expliquer la perte de terrain accusée par l’autorité centrale.  

La colère gronde, au sein de la population et dans les casernes. Après l’immobilisation d’un convoi de l’armée française pendant une semaine à Kaya et les marches du 27 novembre que le régime n’a pu empêcher malgré la coupure d’internet, les annonces de Roch Marc Christian Kaboré ne parviennent plus à démentir le sentiment d’impuissance que dégage son gouvernement.

Se retourner contre la France pour sauver sa tête

Fidèle à l’allié français, prêt à se rendre à Paris à chaque convocation de l’Elysée ou à expulser les pourfendeurs de la Françafrique comme Kemi Seba, le président burkinabè fait mine de retourner sa veste.

« Le problème rencontré par ce convoi devrait nous donner l’opportunité d’interroger véritablement, la coopération entre la France et le Burkina Faso plutôt que de considérer que c’est une manipulation des réseaux sociaux »

Ousseni Tamboura, porte-parole du gouvernement burkinabè, Omega TV, 5 décembre

Un tacle contre le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian qui avait insinué que les réseaux sociaux sont manipulés contre la France, notamment par la Russie… Mais Ousseni Tamboura semble oublier que si la demande de couper internet est venue de la France, c’est bien le gouvernement auquel il appartient qui s’est exécuté.

« Les deux partenaires auraient intérêt à revisiter ces accords de coopération, à revisiter les stratégies qui permettent d’avoir des résultats immédiats dans la lutte contre le terrorisme », a-t-il ajouté.

Lancer des mots si forts, ne signifie pas que le gouvernement burkinabè est prêt à ouvrir la boîte de Pandore que constitue le pacte colonial et l’ensemble des accords opaques de coopération militaire qu’il couve. D’autres dirigeants africains comme feu Idriss Déby, ont utilisé la tactique qui consiste à se distancier publiquement de la France, pour mieux l’étreindre dans le secret. Il faut davantage y voir un « sauve qui peut » de la part d’un gouvernement qui sent sa tête vaciller. Une dernière carte en forme de verbiage souverainiste, tout en faisant l’économie des gages concrets d’un sursaut national.

Teria News

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