Macky Sall a-t-il un problème de priorité? Oui à observer la polémique enfler autour de l’acquisition par le Sénégal d’un nouvel « avion de commandement présidentiel ». En pleine pandémie, nécessité ou caprice présidentiel à 59 milliards de francs CFA?
Difficile pour l’État Sénégalais de convaincre le contribuable de la nécessité de l’achat de ce nouvel « avion de commandement présidentiel ». En effet, alors que les Sénégalais se serrent la ceinture face à la crise économique provoquée par la pandémie de Covid-19, autant dire que la facture salée de l’appareil se digère mal. Le timing défavorable plombe l’argumentaire du gouvernement Sénégalais.
Le choix de la présidence s’est porté sur un Airbus A320neo. Bien que les autorités se sont bien gardées, au nom du secret défense, de dévoiler le coût de cette acquisition, l’appareil a été évalué en 2018 à 110.6 millions de dollars, soit 59 milliards de francs CFA. Un prix de base auquel s’ajoutent celui d’aménagements présidentiels (télécommunication, sécurité…).
Un choix « judicieux »
Le gouvernement affirme que l’acquisition de ce nouvel avion était un choix « judicieux » devant l’état « vétuste » de l’ancien, qui était de plus « onéreux » en carburation et entretien. Pour tenter de mieux faire passer la pillule, le porte- parole du gouvernement, Oumar Guèye a précisé que le paiement de la facture s’est fait sur plusieurs « échéances, dont la dernière est prévue à la date de la livraison« , le 16 juillet prochain. La dépense avait été engagée avant la pandémie, le contrat d’achat ayant été signé en 2019.
Toutefois, si l’information pouvait un temps soit peu atténuer le choc de la facture, elle révèle aussi un problème de transparence dans les dépenses publiques.
Un décaissement futile et indécent selon l’opposition
À Dakar, l’opposition a immédiatement parlé d’une dépense inutile, en déphasage avec les réalités des Sénégalais, voire insultante dans un contexte de crise économique.
Amadou Ba, membre du Pastef, le parti du député Ousmane Sonko a dénoncé un « gaspillage » de « 70 milliards pour avoir un avion plus beau que celui de Angela Merkel« . Ce, alors selon lui que la « jeunesse [Sénégalaise] se noie dans l’océan, les bébés sont calcinés dans les hôpitaux, les femmes meurent en accouchant dans des taxis« . Il a été appuyé par l’ancien ministre des transports terrestres Thierno Alassane Sall. Le président du parti d’opposition la « République des Valeurs », a déclaré sur Twitter: « Macky Sall n’aurait pas pu choisir pire moment pour, encore, décevoir les Sénégalais. […] L’achat d’un avion n’est ni nécessaire, ni prioritaire. L’argument de la vétusté est fallacieux. […] Tout cela est profondément indécent« .
Cette polémique s’invite sur les braises du mouvement social déclenché par la mise en garde à vue d’Ousmane Sonko en mars. Mercredi 26 mai, le Mouvement de défense de la démocratie (M2D) a présenté un mémorandum sur le suivi de la crise. Le M2D estime que depuis la trêve négociée par le khalife général des Mourides, « le président Macky Sall n’a pas daigné respecter ses engagements. Nous avons fait notre part du contrat. Le khalife, nous en avons la certitude, lui a dit tout ce que nous demandions. Une fois encore, il n’a pas tenu sa promesse. En ce moment, il y a encore des jeunes Sénégalais en prison« , a déclaré Cheikh Tidiane Dièyen, coordonnateur du M2D. Le 8 avril passé, le gouvernement avait annoncé une « commission d’enquête indépendante » sur les manifestations de mars. « Depuis, aucun acte n’a été posé, nous n’avons pas été approchés et nous n’y croyons pas« , a également commenté le coordonnateur du M2D. Cheikh Tidiane Dièyen demande par ailleurs que « l’affaire Ousmane Sonko fasse l’objet d’un traitement judiciaire rapide, diligent, impartial et honnête« , avant de conclure: « On verra tout de suite que tout ceci n’était qu’un tissu de montages« .
Teria News