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Guillaume Soro au Niger : une alliance de frondeurs contre Alassane Ouattara

Rencontre Guillaume Soro / Abdourahamane Tiani ce lundi 13 novembre à Niamey : une nouvelle alliance antisystème ? Les deux hommes incarnent, chacun à leur façon, une forme de dissidence dans la sous-région Ouest-Africaine. Un « quitte ou double » pour les nouvelles autorités militaires de Niamey, en quête de reconnaissance et de la levée des sanctions communautaires. Une provocation, voire une menace à peine voilée pour Guillaume Soro.

L’ennemi de mon ennemi est mon ami. C’est en somme l’adage qui gouverne le rapprochement et la rencontre entre Guillaume Soro et le général Abdourahamane Tiani. Tenue ce 13 novembre à Niamey, elle vise à former une alliance antisystème contre deux échelles de gouvernances dont les dynamiques s’imbriquent souvent.

Deux dissidents unis contre un système

« J’ai eu l’honneur d’être reçu ce jour en audience par le président de la transition du Niger, chef de l’État, le général Abdourahamane Tiani, accompagné du général Salifou Mody, ministre de la Défense, et du général Mohamed Toumba, ministre de l’Intérieur, a déclaré Guillaume Soro sur son compte X (ex-Twitter). L’entretien qui a duré une heure et demie a été exceptionnel par la qualité et la profondeur des échanges. »

Guillaume Soro, président Génération Peuples Solidaires

Les deux hommes incarnent, chacun à leur façon, une forme de dissidence dans la sous-région Ouest-Africaine. Suite à la tentative d’arrestation à son encontre, survenue le 3 novembre dernier à Istanbul, l’ancien Premier ministre ivoirien a, dimanche 12 novembre, annoncé la fin de son exil politique et le retour sur sa « terre ancestrale et natale d’Afrique ». Un retour dont la première étape, foulée dès le samedi 11 novembre, est nigérienne. Loin d’un hasard, ce choix exprime la volonté de constituer un front uni contre un système. Celui-ci est représenté à l’échelle nationale par le président ivoirien Alassane Ouattara avec qui Guillaume Soro a politiquement rompu depuis 2019, date de la manifestation de ses ambitions de succéder à son mentor. S’ensuivirent deux condamnations. La première à 20 ans de prison pour recel de bien public, en 2020. La seconde à perpétuité pour atteinte à la sureté de l’État, en 2021, alors qu’il se trouvait déjà en exil. Le système est ensuite représenté à l’échelle sous-régionale par la CEDEAO, organisation dont Alassane Ouattara est un des membres les plus influents.

Leviers de pression contre Alassane Ouattara

Dans cette alliance antisystème, les deux protagonistes utilisent mutuellement l’autre comme levier de pression sur l’échelle qu’ils entendent influencer. Le général Tiani d’une part, sur la CEDEAO. Après l’embargo décrété par l’organisation, en réponse et au lendemain du putsch du 26 juillet dernier, le président du CNSP nigérien semble appuyer « là où ça fait mal » pour le président ivoirien. De plus, en l’absence d’avancées dans les pourparlers avec la CEDEAO portant sur la reconnaissance officielle des autorités de Transition sur la base d’un chronogramme consensuel de retour à l’ordre constitutionnel, Abdourahamane Tiani paraît jouer la carte de la confrontation, parallèlement à celle de la négociation, Niamey ayant désigné le Togo comme médiateur, aux côtés des États-Unis, dans son dialogue avec la CEDEAO et la communauté internationale au sens élargi. Une stratégie à double tranchant autant qu’un « quitte ou double » pour les nouvelles autorités militaires. D’autant, que des mouvements de troupes ont récemment été observés aux frontières partagées par la Côte d’Ivoire avec le Mali et le Burkina Faso, faisant spéculer d’aucuns sur les craintes du régime Ouattara concernant une éventuelle entrée de Guillaume Soro par voie terrestre sur le territoire ivoirien.

Guillaume Soro d’autre part est à la recherche d’un point de chute et d’une terre d’asile. Rencontrer le général Tiani dans un tel contexte de polarisation sous-régionale est assimilable à une déclaration d’hostilités, déjà amorcée la veille. Elle signe ainsi une volonté manifeste de croiser le fer avec un ancien mentor, devenu ennemi. Dès dimanche et la publication de la vidéo dans laquelle il annonce la fin de son exil, Guillaume Soro se présente comme un homme qui, convaincu de ne pouvoir être en sécurité nulle part, n’a plus rien à perdre. En outre, ce rapprochement pourrait également exprimer la volonté de chercher une forme d’onction populaire panafricaniste et souverainiste, selon les vents qui soufflent sur la sous-région Ouest-Africaine afin, pour Guillaume Soro, de mieux s’en auréoler dans sa confrontation avec Alassane Ouattara.

Teria News

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