« Il y a de fortes chances, pour ne pas dire 99% de chances que ça soit un des frères qui a vidé le chargeur sur le président Déby. Il a quand même reçu plus de 35 impacts de balles ! » Alors que le Tchad était vendredi le théâtre d’un bal d’hypocrites orchestré par la « communauté internationale », retour sur les circonstances de la mort d’Idriss Déby enterré le 23 avril. Confidences exclusives d’une source Teria News.
Idriss Déby aurait été assassiné par un demi-frère de Yaya Dillo, membre de la garde présidentielle
« Le 28 février passé, la maison de Yaya Dillo a été l’objet de tirs nourris. Les éléments de la garde présidentielle sont rentrés dans la maison, ont tout cassé. Ils voulaient prendre Yaya Dillo, ils n’ont pas réussi. Ils ont quand même tué sa mère de 90 ans, tué un de ses fils. N’oublions pas ces éléments. Il y a une conjonction d’évènements qui expliquent ce qui est arrivé. Celui qui vient de perdre sa maman a des demi-frères qui sont dans la garde présidentielle. Il y a de fortes chances, pour ne pas dire 99% de chances que ça soit un des frères qui a vidé le chargeur sur le président Déby. Il a quand même reçu plus de 35 impacts de balles ! Et là, personne n’en parle. On l’a tué deux jours avant qu’on annonce son décès. On l’a tué avant les résultats de l’élection présidentielle et normalement, si les choses devaient se passer comme dans un Etat de droit, c’est le président de l’Assemblée nationale qui assure une certaine transition. La Constitution tchadienne est là, les Constitutions africaines servent à quoi ? A rien ! Sauf à donner un semblant de label démocratique à nos pays, ce qui est déplorable. »
Lire l’article de Teria News : Raid meurtrier sur la résidence de Yaya Dillo https://teria-news.com/…/tchad-lopposant-yaya-dillo…/
Hypocrisie de la « communauté internationale »
« Le fait que la communauté dite internationale n’ait pas eu une réaction claire par rapport à la prise de pouvoir par les militaires, c’est une légitimation en quelques sortes. Ce qui veut dire que si d’autres personnes prennent les armes pour arracher le pouvoir, l’Union africaine va se taire, la France doit se taire. Donc, il faudra lire à travers les lignes. Qu’on le veuille ou non, il y a une jurisprudence qui va se créer. Qu’on dise ou pas qu’on leur laisse le temps de faire une période transitoire, tout ça, c’est du pipeau. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils ont mis eux-mêmes, une période transitoire de dix-huit mois renouvelables une fois. C’est dire qu’en trois ou quatre ans, beaucoup de choses peuvent se passer. Tout ça n’est pas normal. Il faudrait qu’on trouve les voies et moyens pour qu’il y ait une bonne gouvernance en Afrique parce que nous sommes la risée du monde entier ! »
Parce qu’elle est minoritaire, l’ethnie Zaghawas à laquelle appartenait Idriss Déby, est soutenue par la France qui entretient un lien de dépendance
« Il y a une constance, c’est que les multitudes d’ethnies depuis l’indépendance rivalisent, soit pour arriver au pouvoir, ou pour se maintenir au pouvoir, au lieu d’unir leurs forces pour le développement du pays. Il y a cette constance là depuis les indépendances : ces conflits effroyables pour accéder au pouvoir ou pour maintenir le pouvoir. Et comme dans d’autres pays Africains, les forces colonisatrices s’arrangent toujours pour aider à arriver au pouvoir les tribus ou les ethnies minoritaires. Je crois qu’il y a un aspect stratégique qu’il ne faut pas oublier. Lorsque vous êtes minoritaire et que vous êtes au pouvoir, vous avez toujours besoin de celui qui vous a installé au pouvoir pour vous maintenir. Donc, il y a un lien d’interdépendance qui naît automatiquement. Si les jeux devaient se jouer normalement, si vous êtes d’une ethnie minoritaire, vous ne pouvez pas accéder au pouvoir. Idriss Déby Itno, il ne faut pas l’oublier, est issu d’une ethnie qu’on appelle les Zaghawas. C’est une communauté minoritaire. »
Double attitude d’Idriss Déby Itno vis-à-vis de la France
« Idriss Déby a commencé depuis un certain moment à tenir un double langage. Lorsqu’il est en face de ses populations, il a un discours très dur envers la France. Et lorsqu’il est en face de ses partenaires français, c’est un autre discours qu’il tient. Et devant un parterre d’Africains, il est même allé jusqu’à remettre en cause les accords monétaires entre les pays de la zone franc et la France. N’oublions pas non plus de prendre en considération le fait que la France dispose d’une base aérienne à N’Djamena. (…) Deux fois en un mois, il y a eu quelques accrochages entre des gendarmes français et la garde présidentielle tchadienne, il y a même eu un mort. (…) Face à la poussée antifrançaise au Tchad, il fallait qu’Idriss Déby en face de ses populations, de ses proches, tienne un discours consensualiste : Vous avez raison, ils nous pillent, ils volent nos ressources. Est-ce que les puissances étrangères peuvent voler les ressources sans leur complicité à eux ? Ça n’existe pas. »
Risques de déstabilisation du Sahel
« L’armée tchadienne est une armée redoutable au même titre que l’armée kenyane. Ce qui est embêtant pour la France aujourd’hui, c’est que cette armée, si elle n’est plus sous « contrôle français », la France aura du mal à jouer un rôle prépondérant contre la poussée djihadiste, notamment au Mali, en tous cas globalement dans le Sahel, parce que, l’armée tchadienne a une expérience qu’aucune autre armée dans la guerre au Sahel ».
La France a-t-elle lâché Idriss Déby ?
« On ne peut pas dire que la France a lâché Idriss Déby. Les chefs croient souvent que le fait qu’il y ait une présence militaire étrangère à leur côté les rend invincibles ou immortels. »
Quel crédit accorder au fils Mahamat Déby, chef du Conseil militaire de transition qui concentre tous les pouvoirs ? parviendra-t-il à maintenir un certain équilibre face aux rivalités tribales et aux menaces rebelles comme djihadistes ?
« Je ne pense pas que le fils ait conscience de ce qui fait le déséquilibre au Tchad puisque, dans le premier décret qui a été signé par lui le 20 avril, et qui compose le fameux Conseil militaire de transition, il a nommé une grande partie de gens qui sont originaires du même fief que lui. Tout ça, ça pose problème quelque part. Cela veut dire qu’on profite d’une contingence, c’est-à-dire l’assassinat du chef, pour faire un « coup d’Etat ». Il lui faudra nécessairement composer avec toutes les diversités ethniques, toutes les diversités d’opinion. Sinon, ce pays restera toujours instable ».
Comment interpréter le départ d’Hinda Déby Itno avec ses enfants ?
« Lorsque vous n’êtes pas la seule première dame, soit vous êtes aimée de l’entourage, ou vous n’êtes pas aimée. Et si vous sentez qu’on ne vous apprécie pas trop, vous vous protégez, vous protégez vos enfants, vous protégez votre progéniture. Je pense qu’elle a peut-être compris que sa place n’est plus là. Ce qui est arrivé au chef peut lui arriver. »
Teria News
Bravo TERIA