Burkina Faso : Emmanuel Macron « a insulté tous les Africains », dénonce Ibrahim Traoré

« Il a insulté tous les Africains […] Voilà comment ce Monsieur voit l’Afrique, voit les Africains. Nous ne sommes pas des humains à ses yeux ». Une semaine après les propos méprisants du président français sur les Africains, Ibrahim Traoré mêle sa voix à celle du Sénégal et du Tchad. S’il y a bien un « ingrat », c’est Macron, assène-t-il encore.

Les déclarations intempestives d’Emmanuel Macron, faites le 6 janvier au cours de la Conférence des ambassadeurs hexagonaux feront sans doute date dans les relations entre la France et le continent africain. Après ses nombreux dérapages verbaux sur les chefs d’État africains, élus démocratiquement ou arrivés ou pouvoir par les armes, leurs stratégies de lutte contre le terrorisme et leur gestion de la grogne populaire croissante contre les relents de l’impérialisme français sous les latitudes Ouest-africaines, le président français a, peut-être, porté le coup de grâce aux résidus tenaces de la Françafrique. Ce faisant, et à son corps défendant, Emmanuel Macron n’a fait que parachever son œuvre, entamée depuis son accession au pouvoir et ses prises de position sur la politique africaine de la France.

Insulter les Africains ? Emmanuel Macron n’en est pas à son coup d’essai

De « l’invitation » déplacée faite à Roch Marc Christian Kaboré de réparer un climatiseur défaillant dans un amphithéâtre où il prenait la parole aux côtés du chef d’État burkinabè d’alors (renversé par le coup d’État de Paul-Henri Sandaogo Damiba en janvier 2022) en 2017, aux saillies virulentes contre le régime d’Assimi Goïta, en passant par la convocation de Pau où, en 2019, le président français intimait l’ordre à ses homologues du G5 Sahel, d’une part, de rappeler que la présence militaire française sur leur sol découlait d’une demande d’assistance formulée envers Paris, et de l’autre, de « faire taire » les voix critiques de cette présence au sein de la société civile, à l’instar de celle du musicien malien Salif Keita, Emmanuel Macron aura, par ses maladresses répétées, certainement été le président français qui aura le plus contribué à l’éveil des consciences sur le continent. 

Dans l’incapacité de se départir d’une arrogance laquelle, inhérente à sa personnalité, imprègne l’ensemble de son leadership politique, celle-ci, dont le peuple français pâtit autant que les populations africaines, aura marqué sa politique sur le continent.

Après Ousmane Sonko et Mahamat Déby, Ibrahim Traoré contre-attaque

« Il y a une partie qui a retenu mon attention, celle où il parlait d’ingratitude et que l’ingratitude est une maladie non transmissible aux humains. Selon lui, il est humain, notre ingratitude n’est pas transmissible à lui. Voilà comment ce monsieur voit l’Afrique et les Africains »[…] S’il y a bien un « ingrat », c’est bien Macron. « Je pense que s’il n’est pas athée et qu’il prie, chaque matin qu’il se réveille et qu’il prie, il devrait aussi prier les Africains. Parce que c’est grâce à nos ancêtres qu’il existe aujourd’hui une France. »

Ibrahim Traoré, lundi 13 janvier lors d’une cérémonie de montée des couleurs au palais présentiel

Outre la réponse faite aux accusations d’« ingratitude » visant les Africains, le président burkinabè a également réagi à la présentation, par son homologue français, de la nouvelle stratégie militaire de Paris en Afrique. Pour Ibrahim Traoré, il s’agit, non pas d’un départ, mais d’une réarticulation de celle-ci sous de nouvelles apparences. Il explique qu’il « s’agit de dissoudre et de garder un dispositif socle. Ils ne partiront pas de certains pays. Ils ont juste dissous le dispositif […] Ils vont constituer des sociétés de sécurité pour sécuriser leurs entreprises qui sont dans ces pays, mais les soldats seront là. Vous ne les verrez plus en tenue ou rassemblés dans des bases », a-t-il déclaré. Ciblant les conseillers militaires, le chef d’État burkinabè affirme que « ce sont eux qui sont chargés de mettre en pratique la politique de la France en Afrique. Ils doivent travailler à rendre nos armées très faibles pour que la France puisse avoir l’argument d’exister ici ».  

Suite aux rectifications du Tchad et du Sénégal, la Côte d’Ivoire apparait comme le seul pays auquel Paris aurait pu, « par politesse », laisser la priorité de l’annonce d’un départ de ses troupes. Si pour les deux premiers, la décision découle de la volonté souveraine et de l’initiative unilatérale de leurs exécutifs respectifs, il semble qu’elle ait été négociée en amont entre les autorités françaises et ivoiriennes avant l’annonce du président Alassane Ouattara, lors de son message de vœux à la nation fin 2024.

Teria News

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