Rapprochement Niger-Algérie : l’accélération du projet de pipeline transsaharien

Longtemps un serpent de mer, le gazoduc transsaharien a été remis à l’agenda mardi 1er octobre par le Niger et l’Algérie. Relancé au cours d’une rencontre entre les ministres de l’Energie des deux pays, il est au cœur du renforcement de la coopération bilatérale entre Niamey et Alger.

Face aux sanctions internationales et aux crises, voire ruptures avec certains partenaires, principalement du Nord depuis l’avènement au pouvoir du CNSP d’Abdourahamane Tiani en juillet 2023, et l’interruption du flux de financements vers le Niger, pourtant jusqu’alors favorisé par donateurs et investisseurs, la diplomatie nigérienne déploie d’importants moyens pour trouver de nouvelles sources de devises. Pour ce faire, Niamey s’appuie sur ses propres ressources que le CNSP cherche à revaloriser en renégociant des contrats avec les multinationales extractives, quitte à leur retirer certains permis d’exploitation. La française Orano et la canadienne GoviEx en ont fait les frais au sujet des gisements d’uranium d’Imouraren et de Madaouéla en juin et juillet derniers. Le Niger compte également réviser un code minier poussiéreux qui lèse l’État en encourageant la conclusion d’accords léonins.

C’est dans ce cadre que le CNSP a entamé un rapprochement avec l’Algérie afin de tirer profit de l’exploitation de ses ressources, principalement pétrolières.

Pétrole et droit de transit

Pour la deuxième fois en quelques semaines d’intervalle, les ministres de l’Energie du Niger et de l’Algérie se sont rencontrés. Ce calendrier signe le renforcement des relations entre Niamey et Alger. Pragmatiques face à l’urgence pour le CNSP de faire entrer des devises, celles-ci reposent sur la mise en œuvre de projets, essentiellement pétroliers. La Sonatrach, compagnie pétrolière nationale algérienne lorgne en effet sur le champ pétrolier de Kafra situé à la frontière algéro-nigérienne. Les deux puits forés devraient permettre, au Niger, d’augmenter sa production de pétrole de 90 000 barils par jour, sans compter que le partenaire algérien offre ses infrastructures pour l’exportation de cet or noir.

Mais les deux ministres ont également abordé le projet de gazoduc transsaharien (TSGP) devant relier le Nigeria à l’Algérie. L’Algérie ambitionne en effet d’acheminer 30 milliards de mètres cube de gaz en provenance du Nigeria via un gazoduc passant par le Niger. Alger se chargera ensuite le l’envoyer en Europe via les gazoducs TransMed (Algérie, Tunisie, méditerranée, Italie) et Medgaz (Algérie, méditerranée, Espagne). En juillet 2022, un accord a été signé entre Alger, Abuja et Niamey à cet effet.      

Le gazoduc transsaharien met également en scène la concurrence avec le Maroc à travers un projet d’oléoduc offshore visant également à acheminer le gaz nigérian cers le marché européen.

Concernant le TSGP, sur les 4 000 kilomètres du tracé, le tronçon Nigeria-Niger du projet transsaharien peut d’ores et déjà se prévaloir d’un taux d’avancement supérieur à 70%.  Destiné au marché européen qui cherche à réduire sa dépendance aux hydrocarbures russes à l’horizon 2027, la sécurité du tracé du gazoduc transsaharien pose toutefois problème. L’instabilité au Sahel et au nord du Nigéria liée aux menaces jihadistes font peser un risque sur deux des trois pays impliqués. Nécessitant des investissements de 13 milliards de dollars, le parachèvement du projet TSGP n’a fait l’objet d’aucun calendrier officiel.

En outre, le Niger marche sur une ligne de crête entre ses intérêts économiques d’une part, et ses alliances politiques de l’autre. Partenaire commercial de Niamey, l’Algérie est accusée par le Mali de soutenir les mouvements rebelles et djihadistes à sa frontière nord. Ce rapprochement met ainsi le CNSP nigérien dans une position délicate alors que les pays de la Confédération des États du Sahel ont décidé d’aligner leurs positions diplomatiques.

Wuldath Mama

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