Partenaire de l’État nigérien au sein de sa filiale Somaïr dans l’exploitation de la mine d’Arlit, Orano (ex Areva) se déclare en « grande difficulté financière » qui pourrait causer « l’arrêt des activités ». En cause : la fermeture de la frontière Niger/Bénin et du corridor terrestre vers les eaux internationales.
Les populations de part et d’autre du fleuve Niger sont les premières victimes de la crise diplomatique entre leurs deux pays dont un des points d’encrages, outre le pipeline reliant les champs de pétrole d’Agadem au terminal pétrolier de Sèmè, est la frontière nigéro-béninoise, fermée depuis bientôt un an. Mais en dehors des difficultés des agents économiques et des familles de chaque côté, les multinationales comme Orano (ex-Areva), leader mondial de la chaîne du combustible nucléaire, subissent également les conséquences de la fermeture de la frontière entre les deux pays. En effet, le corridor terrestre traversant le Bénin est utilisé par le groupe français pour atteindre le port de Cotonou et exporter sa production d’uranium.
Or, depuis la fermeture de la frontière nigéro-béninoise, ce corridor est de facto condamné. Conséquence : 750 tonnes de minerai, soit plus de la moitié de la production annuelle, sont actuellement stockées sans pouvoir être vendues. « On en arrive à un point où Somaïr est en très grande difficulté financière, notamment du fait des difficultés pour pouvoir commercialiser l’uranium », a déclaré le groupe mardi 9 juillet.
Arlit, seule mine d’Orano n’est plus financièrement viable
« On est obligés de consacrer tous nos efforts au maintien de l’outil industriel et au paiement des salaires, et ça, on le fait en vendant de manière conservatoire des stocks […] qu’on a économisés, et qui sont destinés initialement au financement du plan de réaménagement du site à l’issue de sa période d’exploitation. »
Orano, 9 juillet 2024
Après la perte de son permis d’exploitation de la mine d’Imouraren fin juin, Arlit est la seule à ce jour exploitée par le groupe. Ceci, via la société Somaïr, fruit d’un partenariat entre Orano Mining (qui en détient 64%) et l’État nigérien. Difficile depuis juillet 2023 pour Somaïr de maintenir le paiement des salaires de ses 1.400 collaborateurs, déclare Orano. L’achat et l’approvisionnement de réactifs pour le traitement du minerai dans l’usine sur place sont également bloqués.
En 2023, dans le contexte de la crise politique au Niger, le tonnage avait chuté à 1 130 contre environ 2 000 tonnes en année normale, ce qui représente environ 16 % de la production d’uranium d’Orano dans le monde. Pour compenser la baisse de sa production, la Somaïr a donc commencé à utiliser les stocks provisionnés et stockés sur le sol français. Un répit que quelques mois toutefois. « Si la situation ne se débloquait pas rapidement pour la Somaïr, elle serait prochainement contrainte de prendre des mesures sociales [et de] réduction d’activité progressive qui pourraient aller dans les prochains mois à l’arrêt des activités » », annonce Orano.
Orano affirme avoir fait « une […] proposition alternative aux autorités du Niger pour trouver une solution d’exportation soit vers la France, soit vers la Namibie », mais les autorités nigériennes n’ont pas donné suite à ce stade. Orano dit rester « à l’écoute » du CNSP.
Engagée le 25 juin dernier, la médiation des anciens chefs d’État béninois Thomas Boni Yayi et Nicéphore Soglo ont apporté une lueur d’espoir dans la crise diplomatique qui sévit entre le Bénin et le Niger. Le communiqué conjoint publié suite à leur rencontre avec les plus hautes autorités nigériennes, dont le général Tiani, évoque la venue prochaine à Cotonou d’une délégation nigérienne pour amorcer un dégel diplomatique.
Teria News