C’est un séisme géopolitique. L’Iran et l’Arabie saoudite ont annoncé vendredi 10 mars, le rétablissement de leurs relations diplomatiques. Protagoniste de ce rapprochement, la Chine se pose ainsi en nouveau patron de la région, évinçant les États-Unis de leur sphère d’influence historique.
Le grand échiquier est en mouvement et en passe de changer de roi. Annoncé vendredi 10 mars, l’accord entre les deux puissances rivales du Moyen-Orient met fin à sept années de brouille diplomatique déclenchées par l’attaque perpétrée par des manifestants iraniens sur des missions diplomatiques saoudiennes peu après l’exécution d’un leader religieux chiite par l’Arabie saoudite. Une surprise et un bouleversement géopolitique à mettre au crédit de la Chine, médiatrice du réchauffement des relations entre Riyad et Téhéran scellé à Pékin, à huis clos.
Le document stipule que les deux pays s’engagent à mettre un terme aux hostilités, qu’il s’agisse d’attaques directes dirigées contre leurs territoires respectifs, ou indirectes ciblant leurs intérêts régionaux. De plus, Arabie saoudite et Iran rouvriront leurs ambassades et consulats dans un délai de deux mois et participeront à un sommet entre Téhéran et les pays du Golfe organisé au cours de cette année.
Pékin assume son statut de puissance diplomatique
Jusqu’ici un acteur économique dont la diplomatie se concentrait sur les affaires, Pékin se contentait de s’exporter en tant que puissance économique refusant toute ingérence dans la politique intérieure de ses partenaires. À cet égard, l’accord médié entre les deux géants du Moyen-Orient, au cœur de tous les conflits chauds comme froids de la région, marque un tournant. La Chine devient ainsi une puissance diplomatique qui assume désormais le rôle géopolitique qui lui échoit de facto compte tenu de la domination qu’elle exerce sur l’économie mondiale. Sortant de sa posture de neutralité en ce début de XXIe siècle, Pékin convertit ce poids économique, en l’espèce celui de premier importateur de pétrole iranien dans un contexte d’embargo, en influence politique.
Historique, ce précédent fait de Pékin un médiateur des crises internationales. Mais préfigure-t-il pour autant d’un rôle de gendarme du monde, à l’instar de celui occupé par les États-Unis de la fin du XXe siècle aux prémices du XXIe ?
De nouvelles alliances évincent les anciennes
L’accord entre l’Arabie saoudite et l’Iran, dont la rivalité mettait notamment en scène un affrontement entre l’islam sunnite et sa branche chiite, porte un coup violent à l’Axe Riyad-Washington et par ricochet, à l’alliance tacite formée par Riyad et Jérusalem, fragilisant l’État Hébreux dans son conflit avec l’Iran.
Par ailleurs, le rapprochement Riyad-Téhéran sort ce dernier de sa relative marginalisation portée par les États-Unis depuis 2018 et la dénonciation par Donald Trump de l’accord sur le nucléaire iranien.
Au-delà des trois protagonistes, cet accord pourrait avoir un impact sur la guerre au Yémen. Il représente un espoir de paix dans ce pays victime du bras de fer entre Riyad et Téhéran depuis une décennie. Les effets de ce conflit par proxy sur la population yéménite valent au pays le classement de pire crise humanitaire au monde selon l’ONU. Enfin, les nouvelles ambitions de Pékin sur la scène internationale pourraient préfigurer d’une implication accrue dans le conflit russo-ukrainien dont la Chine détient indéniablement la clé.
Teria News