Décrété sans le M23, le cessez-le-feu à l’est de la RDC issu des accords de Luanda du 23 novembre a été rejeté par le mouvement rebelle. Les populations civiles dénoncent l’hypocrisie et l’impuissance des puissances régionales.
C’est un jeu de dupes qui s’observe dans la région des Grands lacs. Mercredi 23 novembre, les chefs d’État associés au processus de paix à l’est de la République démocratique du Congo avaient brandi l’accord de cessez-le-feu de Luanda comme une victoire diplomatique.
Absurde. Pourtant, l’absence de représentants du M23 et du président rwandais, de notoriété publique, pays agresseur de la RDC, aurait dû inviter les acteurs à la prudence. Hypocrisie, aveu d’impuissance du politique face à des enjeux géopolitiques, économiques, qui dépassent la simple échelle régionale. Sans réelle marge de manœuvre devant les puissants sponsors régionaux et les appuis internationaux de la déstabilisation d’un pays aussi riche que pauvre de son sous-sol, les chefs d’État voisins, dont certains sont à la fois juge et partie, ont voulu donner l’impression d’agir, à défaut de le faire réellement, quitte à engager leur crédibilité déjà entamée. Quoi qu’il en soit, les populations civiles n’y ont, à juste titre, vu qu’un texte de plus, un accord en papier, sans portée ni impact sur leur intégrité physique et territoriale.
L’accord de Luanda : déclinaison d’un calendrier ambitieux
Dans sa déclaration finale, le sommet de Luanda présentait un calendrier de cessation des hostilités à court terme. Selon le texte, le 25 novembre à 18h, le M23 devait entamer un retrait des « zones occupées (…) dans ses positions initiales », dans les environs de Sabyinyo, du côté de la frontière congolaise, au plus tard le 27 novembre. Toujours selon le document, le 30 novembre doit acter la reddition et le désarmement de l’ensemble des groupes armés en RDC, permettant le retour des populations déplacées le 2 décembre et ouvrant la voie à la reprise du dialogue entre les autorités congolaises et les groupes armés le 7 décembre dans le cadre du processus de Nairobi. Puis, dit l’accord, la RDC et le Rwanda doivent revenir à la table des négociations fin décembre lors d’un sommet organisé à Bujumbura.
Autre élément central de l’accord de Luanda : le déploiement de la force armée de la Communauté d’Afrique de l’Est à Bunagana, Rutshuru et Kiwanja. Toutefois, en l’absence de retrait des combattants du M23, les chefs d’État partie à l’accord « instruiront l’usage de la force ».
À peine conclu et déjà en péril
Applaudi avec crédulité ou cynisme, l’accord de Luanda est déjà rejeté par le bras armé de la déstabilisation du Kivu. Le M23 déclare en effet ne pas être contraint par les clauses du texte car n’ayant pas été représenté lors de sa signature. Le groupe rebelle se dit en revanche disposé à respecter un cessez-le-feu si ses positions actuelles ne sont pas attaquées. Quant à un éventuel retrait, le porte-parole du mouvement l’exclut catégoriquement en l’absence de négociations directes avec Kinshasa : « Si le gouvernement congolais veut négocier, il doit le faire directement avec nous », déclare Lawrence Kanyuka.
Sceptique, la société civile elle, n’attend rien ou pas grand-chose de ce texte. Alors que les populations de Goma, entassées dans des camps aux conditions de vie barbares, restent terrorisées par l’avancée des combattants, le document de Luanda est rangé dans la pile d’accords sans cesse piétinés par le M23 et ce, sans grandes conséquences pour le groupe rebelle.
Teria News