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Paris gèle l’aide au développement accordée au Mali

La France suspend son aide au développement au Mali. Enième rebondissement d’une rupture en plusieurs actes entre Paris et Bamako, la décision française est contestée par plusieurs ONG. Mais l’Afrique doit-elle compter sur l’aide au développement?

Si le procédé manque de surprendre sur le fond, la forme interroge. Après le retrait contraint du Mali de la force Barkhane, dont l’acte de décès a été publié il y a une semaine par Emmanuel Macron, la décision des autorités françaises s’inscrit dans la continuité de relations, devenues conflictuelles, avec Bamako. Plus encore, elle obéit à une logique déjà déroulée par le Quai d’Orsay. En effet, confronté au repositionnement stratégique de l’État centrafricain en direction de la Russie, notamment scellé par le partenariat sécuritaire noué avec la société de sécurité privée Wagner, au détriment de la coopération avec son état-major, Paris avait, en juin 2021, gelé son aide budgétaire à Bangui. Le désengagement français avait alors été justifié par la montée dans le pays d’un « sentiment anti-français », accusé d’être orchestré par Wagner avec la complicité des autorités centrafricaines.

Un désengagement sans vagues

« Face à l’attitude de la junte malienne, alliée aux mercenaires russes de Wagner, nous avons suspendu notre aide publique au développement avec le Mali »

Source diplomatique anonyme

Alors que la suspension touchant Bangui avait été annoncée à grand bruit, cette fois, Paris a préféré la discrétion. La décision, prise « il y a deux ou trois semaines » selon des médias français citant une source diplomatique, n’a pas fait l’objet d’une annonce officielle de la part du Quai d’Orsay. Aucune réaction n’a non plus émané de Bamako. Seul « Coordination Sud », un collectif de 35 ONG françaises actives au Mali a donné de la voix pour tenter d’infléchir la position de la diplomatie hexagonale. Dans une lettre adressée à Emmanuel Macron, le groupe a ainsi exhorté le président français à « revoir [sa] position », arguant que la suspension de cette aide publique au développement met en péril 70 projets de développement en cours ou prévus dans le pays ces prochaines années.

Non conventionnel, le silence de Paris pourrait être motivé par la volonté de ne pas accroitre son impopularité montante sur le continent africain. Fini les déclarations polémiques, les joutes verbales avec Bamako, Paris semble désormais vouloir mener son bras de fer diplomatique derrière les rideaux.

Une aide au développement polémique

Faut-il, de façon générale, pleurer le retrait des partenaires au développement de l’Afrique ? La décision française remet à jour les polémiques qui accompagnent les politiques d’aide au développement menées par les agences de coopération.

Chercheurs et autres observateurs s’accordent sur leur bilan questionnable, certains allant jusqu’à affirmer qu’il s’agit, pour les pays récipiendaires, d’un jeu à somme nulle, mais d’opérations lucratives pour les pays donateurs. Selon plusieurs travaux, les agences de développement ont ainsi mis sur pied un mécanisme insidieux d’ingérence dans les politiques publiques des pays bénéficiaires tout en garantissant de juteux marchés publics à leurs entreprises. Généralement conditionné à l’octroi du marché à un fleuron national du pays donateur, l’aide au développement ne serait en somme qu’un investissement calculé, auréolé du verni de l’altruisme.

Ce gouffre entre réalité et communication justifie le scepticisme croissant éprouvé par les peuples vis-à-vis de l’aide au développement. Une façon, peut-être, de relativiser les effets de la décision des autorités françaises.

Teria News  

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