De 1235 à 1670, l’Empire du Mali s’est imposé comme un pôle culturel à l’échelle globale. Abritant l’Université de Sankoré Madrasa de Tombouctou, l’Empire était un des premiers centres d’émulation intellectuelle, pendant que l’Occident était encore plongé dans l’obscurantisme.
L’Université de Sankoré Madrasa ou de Sankoré figure dans le trio universitaire mythique (Djingareyber, Sankoré et Sidi Yahia) de la ville de Tombouctou.
800 ans auparavant, l’Empereur Mansa Musa (l’homme le plus riche du monde à son époque) ordonna la création de ce sanctuaire de savoirs qui compte près d’un million de manuscrits sur l’astronomie, la musique, le droit, la religion, les sciences de l’éducation, la botanique, la bonne gouvernance et bien d’autres matières, rédigés exclusivement en langue peulh, bambara et arabe.
Aussi prestigieuse qu’Oxford aujourd’hui s’il faut oser une comparaison, elle assura une transmission des savoirs à 25 mille étudiants et s’est construite sur la réputation de grands maîtres tels le Tarikh el-Fettash (chronique du chercheur), Mahmud Kati, Tarikh es-Sudan ou Ahmed Baba (auteur d’un dictionnaire datant de 1596).
Outre l’or, le sel et l’ivoire, la culture s’avère la plus grande richesse de l’Empire du Mali. « Les principes de bon gouvernement », un recueil de Abdul Karim Al Maguly (1493-1528) énumère certains principes universels de gouvernance, notamment et bien avant Montesquieu, la séparation des pouvoirs ainsi que la toge de probité que doit revêtir la justice, symbole d’impartialité. Ces principes sont traduits en ces termes illustratifs :
« L’impartialité du souverain doit être respectée dans le cas notamment d’un jugement à rendre entre deux personnes opposées par un différend : il faut être juste dans chacun des actes, allant de la façon de recevoir les personnes opposées jusqu’au moment de trancher. Même si l’un des protagonistes tentait un rapprochement avec le souverain-juge, il faudrait éviter toute amitié », « Les hommes de droit qui entourent le Roi ne doivent accepter de pots-de-vin ni avant, ni après le procès » ou encore « Le temps de plaidoirie doit être également équitable. L’équité veut qu’il n’admette pour témoins que des personnes à la moralité avérée ».
Classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO en 1988, grand centre de négoce et d’émulation intellectuelle, scientifique de l’époque médiévale, la ville de Tombouctou avec ses nombreuses écoles et universités prestigieuses où cohabitaient la philosophie, la géométrie, l’architecture, la médecine, les mathématiques et maintes autres sciences, instruisait les enfants dès l’âge de sept ans. Ces derniers avaient déjà la possibilité d’accéder à divers niveaux d’éducation sanctionnés par des parchemins. Œuvres d’érudits noirs, de riches commerçants et d’une gouvernance visionnaire, Tombouctou était un centre intellectuel et scientifique contribuant à l’évolution de l’Humanité, bien avant l’arrivée de la mission dite civilisatrice des occidentaux et ses corollaires que sont l’esclavage, la colonisation, l’exploitation des ressources, sans oublier l’aliénation engendrée par cette dernière.
L’antériorité de Sankoré à l’existence de ses consœurs de Turin, Bordeaux ou Barcelone est révélatrice d’un prétexte civilisateur factice.
Bien qu’envahie en 1591 par les arabes venant de Marrakech, Tombouctou demeure le symbole d’une dynamique intellectuelle typiquement noire africaine. De prestigieuses racines qui, aujourd’hui encore, continuent sans doute d’inspirer grandeur et dignité à l’État malien dans un contexte d’intimidation géopolitique.
L’Eveilleur de Conscience Panafricaine