Les États-Unis entreront en guerre contre la Chine si elle envahit Taïwan, a affirmé Joe Biden jeudi. Cette escalade intervient alors que Pékin resserre son étau sur Taïpei, notamment après la diffusion d’une nouvelle vidéo simulant le débarquement de l’armée chinoise à Taïwan. Une Troisième Guerre mondiale à partir du Pacifique est-elle à craindre ?
Jeudi, au cours d’échanges avec des électeurs à Baltimore, Joe Biden a affirmé que les États-Unis sont prêts à défendre militairement Taïwan en cas d’attaque chinoise. Toutefois, jeudi soir, la Maison blanche a tempéré les propos du président américain en déclarant que la politique américaine vis-à-vis de Taïwan n’avait « pas changé ».
Mais ce n’est pas la première fois que Joe Biden fait allusion à un engagement militaire américain pour voler au secours de Taïwan. Cet été, le président américain a parlé d’« engagement sacré » à défendre « le Japon, la Corée du Sud, et Taïwan ». Sa langue aurait-elle fourché deux fois ? Ou s’agit-il d’une orientation mal assumée de Washington, voire un test visant à préparer l’opinion ? S’estimant menacés par la puissance chinoise, les États-Unis pourraient être limités dans leur marge de manœuvre par l’opinion américaine. Si l’élite est prête à faire de l’invasion de Taïwan un casus belli, il n’est pas sûr que les américains soient disposés à mourir pour la souveraineté de cette île du Pacifique.
Intimidations croissantes de la Chine
Les déclarations de Joe Biden interviennent alors que les tensions entre la Chine et Taïwan sont à leur pic. Il y a quelques jours, Pékin a diffusé une nouvelle vidéo simulant un débarquement de l’armée chinoise à Taïwan. La répétition grandeur nature d’une invasion de l’île par son puissant voisin entre dans le cadre d’une stratégie de provocations croissantes de la Chine vis-à-vis de son ancienne province, qu’elle revendique comme un territoire rebelle à réintégrer à la grande Chine, une erreur de l’histoire à rectifier.
« Pour l’armée, la situation actuelle est la plus sombre depuis 40 ans », alertait début octobre, le ministre taïwanais de la Défense, après l’incursion record de 150 avions de guerre chinois dans la zone d’identification de défense aérienne de Taïwan. Alors qu’en 2020, le ministère taïwanais de la Défense en avait comptabilisé 380, ces incursions s’élèvent déjà à 500 en 2021. De quoi renforcer le scénario d’une invasion chinoise de Taïwan, anticipée par Taipei d’ici 2025.
L’Indo-Pacifique est devenu le centre de l’attention des États-Unis qui, se sont tout juste désengagés d’Afghanistan, et plus largement du Moyen-Orient pour l’Asie, depuis la présidence Obama. Mais Washington a depuis toujours eu une attitude ambiguë vis-à-vis de Taïwan, en participant d’un côté au renforcement de son armée, sans toutefois de l’autre signer de traité avec Taïpei qui garantisse une défense militaire de Taïwan. Aujourd’hui les Etats-Unis contemplent leur déclin face à la Chine, laquelle devrait devenir la première puissance mondiale d’ici 2050. Taïwan devient alors un prétexte pour engager un bras de fer avec son rival géopolitique. Entre les deux géants se multiplient les tensions commerciales, technologiques et militaires, récemment illustrées par le tir par la Chine d’un missile hypersonique, une technologie que les États-Unis ne maitrisent pas encore.
Washington répond en encerclant Pékin avec des alliances impliquant les voisins de la Chine : l’Aukus avec l’Australie et le Royaume-Uni et le Quad avec le Japon, l’Inde et l’Australie. De plus, les États-Unis envoient des forces spéciales à Taïwan et vendent des armes à l’île.
Taïwan, serait-elle pour autant la Pologne du XXIe siècle ?
Chine et États-Unis, deux puissances nucléaires, n’ont pas intérêt à engager un conflit armé. À ce jour, ces intimidations réciproques entrent davantage dans le cadre d’une guerre psychologique. Il s’agit de démonstrations de force visant la dissuasion et l’équilibre.
Toutefois, demeure la crainte d’une guerre accidentelle, déclenchée par un incident qui enclencherait une escalade. Surtout que les manœuvres américaines en mer de Chine se multiplient, tout comme les invasions chinoises du Détroit de Taïwan. En outre, la Chine a peut-être en tête l’invasion de la Crimée par la Russie en 2014. Mis à part les sanctions diplomatiques et économiques, aucune riposte militaire n’avait été menée.
Teria News