La Cour d’appel de Paris a confirmé ce vendredi le non-lieu prononcé fin 2018 pour neuf rwandais. Tous proches du président rwandais Paul Kagame, ils étaient mis en examen dans l’enquête sur l’attentat contre l’avion du président Juvénal Habyarimana. L’attaque est considérée comme le déclencheur du génocide rwandais de 1994.
Après six mois de délibérations, les magistrats de la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel ont confirmé la décision des juges antiterroristes, qui ont ordonné le 21 décembre 2018 d’abandonner les poursuites contre neuf membres ou anciens membres de l’entourage de l’actuel président rwandais, Paul Kagame.
La procédure judiciaire dure depuis plus de 20 ans. 20 années de relations diplomatiques franco-rwandaises particulièrement houleuses.
La Cour n’a pas encore donné ses motivations. La défense, elle, se déclare soulagée, même si cet arbitrage ne clôt pas définitivement le dossier. D’autant plus que les parties civiles ont déjà annoncé s’être pourvues en cassation. « C’est une décision qui ne nous surprend pas, malheureusement » mais « ça ne met pas fin au combat des parties civiles, le combat d’une vie », a déclaré à la sortie de l’audience Me Philippe Meilhac, avocat d’Agathe Habyarimana. Il a dénoncé une « chape de plomb » et « une connotation politique omniprésente » dans ce dossier, citant des propos récents du président Paul Kagame: « Vouloir rouvrir un dossier classé, c’est vouloir créer des problèmes », avait averti cette semaine le président rwandais dans un entretien à l’hebdomadaire Jeune Afrique. « Je crois que le passé est derrière nous », a-t-il ajouté.
Un des avocats de la défense Me Léon-Lef Forster a estimé que le pourvoi constituait une nouvelle « manœuvre dilatoire » de la part des parties civiles.
Dans l’hypothèse ou ils n’obtiendraient pas de procès immédiat, ils espéraient au moins que la Cour ordonne la réouverture des investigations afin que la justice française soit en possession d’un rapport secret datant de 2003 du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui attribuait la responsabilité de l’attaque à l’entourage du président Paul Kagame.
Les enquêteurs français ont longtemps orienté leurs soupçons vers des rebelles tutsis menés par Paul Kagame, avant de pencher vers la thèse d’une implication d’extrémistes hutus, désireux d’écarter un président jugé trop modéré.
Rappelons que Kigali avait rompu les relations diplomatiques avec Paris entre 2006 et 2009, après l’émission des mandats d’arrêt contre ses proches dans ce dossier.
Enfin, cette affaire, comme d’autres, pose la problématique du traitement judiciaire des contentieux historiques et politiques de pays africains par d’anciennes puissances coloniales. En effet, bien que les procédures judiciaires entamées dans ces États soient compréhensibles au regard du déficit démocratique de nombreux pays du continent dans lesquels ces questions sont étouffées et ceux qui les soulèvent réprimés, elles contribuent à dire une vérité qui ne leur appartient pas.
Teria News