AfriquePolitique

Mardi, l’armée américaine, plus précisément son commandement africain basé à Stuttgart (Africom) a accusé la Russie d’avoir envoyé des avions de chasse en Libye pour appuyer les mercenaires russes du groupe Wagner, qui y combattent au sol, aux côtés de l’Armée nationale libyenne (ANL) menée par l’autoproclamé maréchal Khalifa Haftar

Ces accusations interviennent quelques heures après le repli de mercenaires vers l’aéroport de la ville de Bani Walid, qui ont abandonné toutes les lignes de front à Tripoli.

Publié mardi, le communiqué de l’Africom confirme le tweet du ministre libyen de l’Intérieur du Gouvernement d’union nationale (GNA), Fathi Bachagha, daté du jeudi 21 mai. Ce dernier affirmait alors qu’au moins huit avions militaires russes ont atterri dans l’Est et le Sud de la Libye. Il s’agit de Mig 29 et de Sukhoï 24. Africom précise que ces avions de quatrième génération sont arrivés en Libye depuis une base militaire russe en transitant par la Syrie, où ils ont été repeints pour cacher leurs origines.

Toujours selon Africom, l’objectif est d’apporter un soutien aérien aux mercenaires de la société militaire privée russe Wagner en Libye. La présence de ces mercenaires sur le sol libyen est pour le Kremlin une façon de s’impliquer incognito dans le combat au sol auprès des troupes de l’ANL.

« Comme elle l’a fait en Syrie, la Russie essaie clairement de faire pencher la balance en sa faveur en Libye », avance le communiqué américain. Le Pentagone accuse ainsi Moscou de violer l’embargo de l’ONU sur les armes. Des accusations régulièrement portées contre les grandes puissances par la Mission des Nations unies en Libye.

Si la Russie est le membre du Conseil de sécurité de l’ONU le plus ouvertement engagé militairement en Libye aux côtés de l’ANL, les États-Unis et la France le sont également, bien que dans une moindre mesure. Par ailleurs, la marque des services de renseignement américains repose sur Khalifa Haftar.

L’officier est un des artisans du coup d’État de 1969 qui a conduit à la chute du roi Idris 1er et l’arrivée au pouvoir de Mouammar Kadhafi. En 1987, il prend la tête un corps expéditionnaire libyen envoyé contre le Tchad. Capturé et emprisonné à N’Djamena, il trahit Kadhafi. Désormais l’homme des américains, il est chargé de commander au Tchad une force destinée à renverser son ancien chef. Sa tentative de putsch se solde par un échec. En 1990, après l’élection d’Idriss Deby, allié du colonel Kadhafi, il est exfiltré en urgence vers les États-Unis. Khalifa Haftar prend alors ses quartiers près de Langley, le siège de la CIA. De là, il poursuit en vain ses tentatives pour renverser Kadhafi. De retour en Libye en 2011, le label d' »homme des américains » lui collant à la peau, son impopularité le contraint de retourner aux États-Unis, après avoir brièvement commandé les forces terrestres de la rébellion qui a mené à la chute de Kadhafi. Ce n’est qu’en 2014 qu’il réussit son retour en prenant la tête de l’autoproclamée ANL, laquelle s’illustre en chassant les islamistes de Benghazi en 2017. Son armée, soutenue dans la région par l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis remporte d’autres importantes victoires. En plus de contrôler une grande partie du territoire libyen et d’encercler Tripoli, fief du GNA, elle tient le stratégique croissant pétrolier.

Les dénonciations américaines doivent être replacées dans la complexité du conflit libyen et l’entremêlement d’intérêts tantôt concurrents, tantôt convergents.

Enfin, les renforts militaires russes déployés en Libye sont une réponse aux récents succès militaires enregistrés par forces du GNA, grâce au soutien aérien de la Turquie. Ces dernières semaines, elles ont conquis plusieurs villes de l’Ouest libyen, arrachées à l’ANL. L’arrivée des avions de chasse russes devrait marquer une nouvelle escalade du conflit.

Teria News

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page