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Vendredi soir, le président guinéen Alpha Condé a annoncé un report du scrutin législatif et du référendum sur une nouvelle Constitution

Les électeurs devraient être convoqués dans deux semaines, sans date précise. La Commission électorale « va saisir la Cour constitutionnelle pour la fixation d’une nouvelle date dans la fourchette indiquée » a précisé Alpha Condé dans une lettre à la Cedeao.

Le double vote devait se tenir dimanche 1er mars. Le pouvoir a fait le choix du couplage de deux enjeux, l’un moins impopulaire que l’autre. En effet, les élections législatives sont attendues depuis fin 2018, et le référendum, soupçonné d’être une manœuvre pour permettre au président Alpha Condé de briguer un 3e mandat, est contesté dans la rue depuis le mois d’octobre. La Loi fondamentale guinéenne actuelle ne permet pas au président de se représenter. La nouvelle limite à 2 le nombre de mandats, mais les détracteurs du projet redoutent, à l’image des scénarios ivoiriens et togolais, que la disposition soit non rétroactive, en d’autres termes, qu’elle remette les compteurs à zéro pour Alpha Condé. En conséquence, les appels au boycott du double scrutin se sont multipliés, et les manifestations intensifiées ces derniers jours.

Face aux accusations, le président guinéen continue de défendre un texte « moderne », et met en avant des avancées sociales, comme l’interdiction de l’excision et du mariage des mineurs, l’égalité des sexes, la répartition des richesses en faveur des tranches les plus jeunes et les plus pauvres de la population.

Avec ce report, le pouvoir cède à la pression de la communauté internationale

L’Organisation internationale de la francophonie (OIF), a en début de semaine, été la première à se désolidariser de l’organisation du couplage du 1er mars, à cause d’un fichier électoral qualifié de « problématique ». 2.5 millions de noms y apparaitraient en double ou correspondraient à des personnes défuntes. Emboitant le pas à l’OIF, l’Union africaine et la Cedeao ont aussi pris leurs distances, et décidé de ne pas déployer d’observateurs. La Cedeao avait tenté une mission de bons offices, avec à sa tête le président nigérian Muhammadu Buhari, dont Alpha Condé est réputé proche, avant de la reporter. L’Union européenne elle, a mis en doute « la crédibilité des échéances électorales à venir » pour cause d’ « absence de transparence ».

Le président guinéen affirme que ce report « n’est ni une capitulation ni une reculade ». Sans observateurs, l’issue du référendum constitutionnel et du scrutin législatif n’aurait aucune légitimité, et Alpha Condé obtiendrait difficilement une validation par ses pairs. Selon les autorités guinéennes, les deux semaines de report seront mises à profit pour obtenir un « fichier électoral consensuel ». Mais avec une population de plus de 11 855 000 habitants, ce délai apparait d’ores et déjà impossible à tenir, le défi nécessitant rien de moins qu’un nouvel enrôlement, qui s’étalerait sur plusieurs mois.

Le pouvoir pourrait chercher à gagner du temps, et éviter de sembler donner raison aux critiques, en renvoyant l’échéance à une date plus lointaine. Les élections législatives, d’abord prévues pour le 28 décembre, ont été reprogrammées pour le 16 février, puis devaient être couplées au référendum constitutionnel le 1er mars. Devant le nouveau rebondissement de vendredi, et compte tenu du délai peu réaliste de deux semaines pour «toiletter » le fichier électoral, un énième report n’est pas une éventualité à exclure.

Teria News

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