La Russie qui s’est abstenue, est accusée d’envoyer des mercenaires en soutien au Maréchal Khalifa Haftar, les mercenaires étant pour les États le meilleur moyen de faire la guerre en passant incognito, ou presque.
Près de 4 semaines se sont écoulées depuis la conférence de Berlin sur la Libye. Des 15 membres du Conseil de sécurité, 14 ont voté en faveur de la résolution, la Russie s’est abstenue. Moscou a pesé de tout son poids pour que la résolution ne fasse pas mention de « mercenaires ». La Russie, soutien du Maréchal Khalifa Haftar, est accusée d’être derrière la présence de mercenaires de la société militaire privée (SMP) russe Wagner.
Le groupe Wagner opère aussi pour la Russie en Syrie. Il aurait engagé jusqu’à 1600 agents sur le terrain selon une enquête du journal russe RBK. Aujourd’hui Wagner est accusée d’être en Libye pour le compte de la Russie. La SMP permet au pays d’être présent sans l’être comme en Crimée, région au sud de l’Ukraine, qui en 2014 a fait sécession pour se rattacher à la Russie après un conflit éclair provoqué par de « petits hommes verts », au passeport russe.
Les mercenaires sont parfois des vétérans de guerre, attirés par des salaires supérieurs à ceux gagnés au service d’armées régulières. En principe, les SMP obtiennent des contrats pour assurer la sécurité de sites (pétroliers, gaziers), entraîner policiers et militaires, et venir en appui logistique aux armées régulières. Cependant, dans les faits leur rôle est bien plus grand.
Ainsi la SMP américaine Blackwater, rebaptisée Academi en 2011 a été reconnue coupable de bavures à l’encontre de la population civile irakienne. 17 civils furent tués dans une fusillade en Irak en 2007, pour laquelle 4 ex-employés de Blackwater ont été condamnés aux États-Unis en 2015. En 2011 l’Irak aurait abrité plus de mercenaires agissant pour le compte de l’armée américaine que de soldats américains. Blackwater s’est aussi tragiquement illustrée en Afghanistan où elle a été associés à des opérations offensives sur le terrain dans une totale opacité.
Malgré les scandales, le recours aux mercenaires par Washington se poursuit. Suite au retrait des États-Unis de Syrie annoncé début octobre 2019, Donald Trump a semblé faire marche arrière à la fin du même mois, en annonçant le renfort de la présence militaire américaine dans l’est de la Syrie, où se situent des champs pétroliers. Officiellement, cette présence devait barrer l’accès aux revenus pétroliers du groupe État islamique, mais le ministère russe de la défense avance d’autres motivations. Dans un communiqué publié fin octobre, le porte-parole du ministère russe, Igor Konachenkov a affirmé que le pétrole avait été «activement extrait et acheminé en masse, à bord de camions-citernes, pour le raffinage en dehors de Syrie». Toujours selon ce communiqué, sont impliqués des soldats américains comme des mercenaires, salariés de sociétés militaires privées américaines. «Sous la protection des militaires américains et de sociétés privées américaines de mercenaires, des camions-citernes des champs pétroliers de l’est syrien se dirigent en contrebande vers l’étranger. En cas d’attaque contre un tel convoi, les forces spéciales et l’aviation de combat américaines seront immédiatement impliquées pour le protéger», dévoile le communiqué. La Russie précise que la pratique a eu cours avant et après la déroute des combattants du groupe État islamique.
La dénonciation de Moscou est-elle désintéressée? Non, à en croire les témoignages de mercenaires du groupe Wagner, qui affirment l’existence d’un contrat entre Bachar al-Assad et Vladimir Poutine, selon lequel le dernier fournit aux forces du régime syrien une assistance militaire en échange de ressources pétrolières.
Les mercenaires ont de tout temps existé. Mais leur utilisation massive par les États marque une privatisation croissante de la guerre. Elle se fait ainsi sans encadrement aucun, est exemptée de toute reddition de compte, et n’est régulée que par la seule logique du profit. Les activités militaires financées par les États par le biais des SMP revêtent l’avantage de ne pas être contrôlées aussi scrupuleusement par les parlements nationaux que s’il s’agissait d’armées nationales. Les SMP font la sale besogne des États, leur assure une présence officieuse sur des terrains où elle est désapprouvée par leurs populations.
Ces sociétés ont un autres avantage. Elles permettent aux États de s’affronter en se dérobant aux regards de leurs opinions publiques nationales. Si l’armée russe appuie officiellement l’armée syrienne dans des opérations aériennes, elle est représentée au sol par Wagner, ainsi le drapeau national évite d’essuyer des pertes en vies humaines. La coalition alors menée par les États-Unis d’une part, et la Russie d’autre part, donnent l’illusion de ne pas se combattre frontalement et entretiennent l’image de nations en paix.
Teria News