Kemi Seba est « candidat » à la présidentielle de 2026 devant l’offre politique jugée inadéquate. Mais ses ambitions se heurtent au code électoral tel que corsé en mars 2024 par une majoration du quota de parrainages. Que dévoile son appel, médiatique et non-conformiste, à une désignation du parti Les Démocrates ?
Plusieurs mois de réflexion l’ont conduit à prendre cette décision, confie-t-il dans une vidéo largement partagée, dimanche 5 janvier, sur les réseaux sociaux. L’année commence sur les chapeaux de roue pour Kemi Seba qui, avec son annonce, replace la question de la succession à Patrice Talon au sommet de l’agenda politique national.
Le sujet est pour le moins tabou au sein de la majorité présidentielle dont un des membres, le ministre de l’Eau et des Mines, Samou Seïdou Adambi, vient de faire les frais, frappé d’une suspension de toutes les fonctions dirigeantes au sein du parti Bloc républicain (deuxième parti de la mouvance présidentielle) pour actions « solitaires ». Il aurait eu le malheur de déclarer publiquement sa candidature à l’élection présidentielle de 2026, en violation, estime sa formation politique, de la réforme du système partisan. Toutefois, un an avant l’échéance électorale, l’heure, pour mouvanciers comme opposants, est pourtant bien à la clarification des positionnements des principales figures de la vie politique nationale et surtout, à la réponse à une question : quel dauphin le chef de l’État sortant s’est-il choisi ?
Une « candidature » motivée par l’urgence socio-économique nationale
En attendant la réponse à ces interrogations, l’activiste panafricaniste Kemi Seba a jeté un pavé dans la mare. Le président le d’ONG Urgences Panafricanistes justifie sa « candidature » par la situation socio-économique de ses concitoyens : du fonctionnaire au paysan, dont les sojaculteurs sont des symboles, cette dernière s’est, selon son constat, particulièrement détériorée sous le régime de la rupture avec une hausse du prix des denrées de première nécessité, du gaz et de l’essence, jamais jugulée dans les faits malgré les efforts des autorités. Parallèlement à la paupérisation de ce « Bénin d’en bas », de l’autre côté, les élites proches du pouvoir s’enrichissent elles, de façon « éhontée », a-t-il à plusieurs reprises eu l’occasion de déplorer. Opposées, ces deux dynamiques renforcent les inégalités et jettent le discrédit sur le bilan de la gouvernance Talon. Or, face au besoin de justice sociale exprimé par les Béninois, l’offre politique, estime l’activiste, ne fournit aucune alternative robuste pour répondre aux enjeux sociaux-économiques du moment.
Disruptif, à la fois envers le système national et l’ordre international, son profil, lui apparait alors comme adapté aux urgences politiques nationales. D’autant que les combats de Kemi Seba lui ont octroyé une certaine popularité auprès d’une partie de la jeunesse laquelle voit en lui une alternative crédible à la cohorte d’élites aseptisées qui se rêvent un destin présidentiel.
L’impasse du code électoral
Toutefois, plusieurs obstacles se dressent sur la route de l’activiste. Sa « candidature » achoppe d’une part sur le système partisan tel que réformé à deux reprises (2019 et 2024), notamment avec l’exigence du parrainage tel que corsé dans le code électoral amendé il y a un an afin que les candidatures soient l’émanation des partis politiques et non plus de cavaliers solitaires. Ainsi, seuls les quatre partis ayant d’ores et déjà des députés et /ou maires siégeant, soit l’Union progressiste le renouveau (députés et maires), le Bloc républicain (députés et maires), Les Démocrates (uniquement les députés) et la Force cauris pour un Bénin émergent (uniquement les maires), peuvent parrainer un candidat.
Le parrainage du ticket présidentiel doit, par ailleurs, correspondre à un quota de 15% de l’ensemble des députés et des maires, provenant de plus, d’au moins 3/5e des circonscriptions électorales législatives. Cette dernière condition peut également être remplie grâce à un « accord de gouvernance », conclu avant le dépôt des candidatures à l’élection présidentielle et déposé à la CENA. Dans ce cadre, un député ou maire peut parrainer un candidat membre de l’un ou l’autre des partis signataires de l’accord.
Si Urgences Panafricanistes n’a pas caché l’existence de négociations, entamées depuis plusieurs mois avec le parti Les Démocrates, la sortie en force, dimanche 5 janvier, de son président est paradoxalement la preuve que celles-ci patinent. Dès lors, la prise de parole de Kemi Seba s’apparente davantage à un coup médiatique visant à exercer une pression ultime sur le parti en mettant sa popularité dans la balance. Ce va-tout qui consiste à prendre de court la formation politique, indique ainsi, en réalité, une impasse. En outre, avec ses ambitions présidentielles, Kemi Seba ne s’attaque pas uniquement à un système national mais, également, et de son propre aveu, à un ordre sous-régional et international désigné comme impérialiste et dont les ramifications locales représentent un tout autre défi.
Teria News