Moyen-Orient : États-Unis et Iran veulent éviter le piège tendu par Netanyahu

Pourquoi la riposte iranienne et de l’« Axe de la résistance » tarde-t-elle après l’assassinat du chef politique du Hamas ? Depuis deux semaines, Téhéran et Washington multiplient les rencontres pour éviter le piège tendu par Benyamin Netanyahu aux deux puissances : la guerre totale. Au centre du dialogue figure le discret sultanat d’Oman.

Si le Qatar est devenu, au fil des années, un acteur diplomatique incontournable du Moyen-Orient, passerelle entre les intérêts des puissantes régionales et ceux des puissances globales, principalement des États-Unis, le sultanat d’Oman occupe une place discrète, mais non moins importante dans le dialogue entre les acteurs de la région. Depuis l’ère Obama, Oman a en effet été choisi par la diplomatie américaine pour faciliter les discussions avec l’Iran. D’abord autour de l’accord sur le nucléaire iranien, conclu en 2015 puis dénoncé par Donald Trump trois années plus tard. Ensuite, pour éviter toute confrontation directe entre les deux puissances.

C’est ce second rôle qui a été réactivé à la faveur des tensions régionales qui menacent la région d’embrasement depuis l’attaque du 7 octobre 2023 perpétrée par le Hamas et la riposte israélienne qui s’ensuivi. Le double assassinat du leader de la branche militaire du Hezbollah et du chef politique du Hamas le 31 juillet dernier fut un autre tourant. Imputés à Israël, ces évènements ont placé l’Iran et les États-Unis dans une posture délicate et rapproché, plus que jamais, l’éventualité d’un affrontement direct entre les deux puissances et ainsi, d’un embrasement de la région, voire d’une nouvelle guerre mondiale que les deux pays se sont jusqu’ici évertués à éviter.

Le succès à court terme d’un calcul de survie politique

Bien qu’Israël n’ait pas revendiqué l’assassinat d’Ismaël Haniyeh, les principaux acteurs de la région lui en imputent implicitement la responsabilité. Alors que Joe Biden et son administration annonçaient l’imminence d’un accord de cessez-le-feu devenu vital pour l’héritage politique du président américain sortant, le double assassinat politique du 31 juillet porte un coup d’arrêt à des pourparlers soutenus de longue haleine par les diplomaties américaine, qatarie et égyptienne. Un torpillage qui apaise la branche extrême de l’échiquier politique israélien. Alliée de Benyamin Netanyahu au sein d’une coalition gouvernementale fragile, elle s’oppose à toute négociation avec le Hamas ainsi qu’à une quelconque normalisation du groupe dans la perspective d’une administration partagée de la bande de Gaza avec le Fatah une fois la fin d’une guerre dont le bilan en pertes civiles s’élève à plus de 39 623 morts Palestiniens. À cet égard, la nomination de Yahya Sinouar, cerveau présumé des attentats du 7 octobre, en remplacement d’Ismaël Haniyeh, constitue la réponse politique musclée du Hamas.

Sur le plan personnel, il permet également au Premier ministre israélien de perpétuer l’état de guerre, possiblement via l’ouverture d’un nouveau front avec le Liban, pour retarder l’ouverture d’une enquête parlementaire sur sa responsabilité dans les évènements du 7 octobre, boite de pandore vers d’autres dossiers judiciaires pendants.

Le piège redoutable de Benyamin Netanyahu

Mais, avec l’humiliation de l’assassinat d’Ismaël Haniyeh pour Téhéran, le calcul politique de Benyamin Netanyahu est de contraindre l’Iran à une réponse brutale, à la mesure de l’affront reçu, et ainsi, dans l’optique d’une attaque massive dirigée contre Israël sous parapluie américain, d’entrainer les États-Unis dans un conflit direct avec l’Iran et une guerre régionale totale qui détruirait de surcroit toute perspective de reprise de dialogue sur un programme nucléaire iranien. Un scénario que les deux puissances souhaitent éviter.

À Oman et en Turquie, les négociations entre Américains et Iraniens se poursuivent et expliquent le retard pris par la riposte de Téhéran dont les proxys régionaux se sont bornés, depuis le 31 juillet, à l’attaque de quelques bases américaines en Irak et en Syrie, faisant des blessés Américains. Contre une réponse iranienne mesurée, à l’image de celle du 14 avril après l’attaque par Israël du consulat iranien de Damas, le États-Unis, selon certaines sources, offriraient à l’Iran des renseignements sur l’identité des agents Iraniens impliqués dans l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh. En outre, signe supplémentaire de la volonté des deux pays de prévenir toute escalade, une ligne directe aurait également été mise en place entre Washington et Téhéran.

Teria News

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