Rwanda et Ouganda, soutiens du M23 selon l’ONU

Les officiers rwandais ont « de facto » pris « le contrôle et la direction des opérations du M23 », selon un nouveau rapport de l’ONU. En plus d’un soutien armé, Kigali aurait mobilisé plus de 3.000 soldats pour combattre aux côtés du M23 dans l’est de la RDC. L’Ouganda est également épinglé pour laisser passer leurs combattants sur son territoire.

Rendu public le 8 juillet, le nouveau rapport semestriel des experts de l’ONU sur la RDC est particulièrement accablant pour le Rwanda. Intitulé la « conquête territoriale » de l’armée rwandaise dans l’est de la RDC, il avance que les officiers rwandais ont « de facto » pris « le contrôle et la direction des opérations du M23 ». Les enquêteurs accusent Kigali d’avoir « violé l’intégrité et la souveraineté de la RDC » et jugent ses dirigeants « responsables des actions du M23 » à travers le soutien qu’ils apportent à leur « conquête territoriale ».

Défait en 2012 par l’armée congolaise, le M23 a repris les armes en 2021. Depuis, les rapports des Nations unies et de plusieurs ONG pointent la responsabilité du Rwanda voisin dans la montée en puissance du groupe rebelle. Un temps contesté par Kigali, les autorités cachent de moins en moins leur engagement aux côtés de ces combattants, acteurs et symboles de la guerre des ressources qui se joue à l’est de la RDC, plus particulièrement dans la province du Nord-Kivu. Cité au nombre des puissances régionales autrices de la déstabilisation la RDC, l’Ouganda dont le rôle avait été éclipsé par celui du Rwanda, est à nouveau évoqué comme facilitant l’acheminement des combattants du M23 auxquels le pays est accusé par l’ONU d’ouvrir son territoire.

Plus de 3.000 soldats rwandais en renfort au M23

Un millier d’entre eux auraient traversé les frontières de la République démocratique du Congo en janvier 2024. En tout, 3.000 à 4.000 soldats de l’armée régulière rwandaise appuient le M23 dans sa rébellion contre l’armée congolaise, au motif de cette dernière s’est associée aux FDLR, milice originellement composée d’anciens génocidaires Hutus, mais plus largement aux « wazalendo » (« patriotes » en swahili, regroupant l’ensemble des milices combattant avec l’armée congolaise). Un cadre et prétexte politique au pillage des ressources immenses du sous-sol congolais (coltan, or, diamants…).

Appuyé par des images aériennes, le rapport montre des colonnes d’hommes lourdement armés en uniforme. Certains y transportent ou opèrent des pièces d’artillerie et des armes de gros calibre, des véhicules blindés avec radar et système de missiles antiaériens, des pick-up et des camions de transport de troupes. Les experts documentent également l’enrôlement d’enfants-soldats issus des camps de réfugiés au Rwanda, « dès l’âge de 12 ans », précise le texte.

Kigali et Kampala, même combat ?

Sans contester le cœur des conclusions du rapport onusien, le Rwanda, via sa porte-parole, Yolande Makolo, estime que « la RDC a tous les moyens de désamorcer la situation si elle le souhaite, mais jusqu’à ce moment, le Rwanda continuera de se défendre », rappelant que le président Félix Tshisekedi « a menacé à plusieurs reprises de déclarer la guerre au Rwanda ». Des menaces que le pays prend « très au sérieux », a-t-elle ajouté.

Quant à l’Ouganda, les experts onusiens évoquent « un support actif » de certains officiers de l’armée et du CMI, les renseignements militaires.

Bien qu’appuyant les accusations de Kinshasa et le lobbying de Félix Tshisekedi en faveur de l’isolement diplomatique du Rwanda par ses partenaires occidentaux, le rapport de l’ONU met également les autorités congolaises dans l’embarras. En effet, Kinshasa et Kampala sont depuis un an partenaires dans la province de l’Ituri où leurs armées mènent une opération conjointe nommée Shujaa contre les islamistes ADF.    

La semaine dernière, l’Union européenne a gelé l’examen de sa nouvelle aide militaire, d’un montant de 20 millions d’euros, au Rwanda en appui à son opération au Mozambique. Bruxelles finance l’intervention de Kigali contre l’insurrection islamiste au Cabo Delgado autour d’importants gisements d’hydrocarbures dont l’exploitation a été confiée à des fleurons industriels européens comme Total. Régulièrement accusée, comme les États-Unis et la Grande-Bretagne d’hypocrisie, l’UE pourrait prendre de nouvelles sanctions contre Kigali pour son implication auprès du M23.

Teria News

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