Ce 25 mai marque la Journée mondiale de l’Afrique. Alors qu’elle célèbre l’anniversaire de la signature des accords de l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine), le 25 mai 1963, cette journée rappelle l’échec du panafricanisme institutionnel, prisonnier des agendas géopolitiques de ses bailleurs étrangers. Mais le panafricanisme vit à travers la société civile.
On adore la détester. Et pour cause. L’Union africaine (UA) qui succède en 2002 à l’Organisation de l’unité africaine (OUA), ne cesse de décevoir les populations qu’elle a vocation à défendre.
Son impuissance à trouver un consensus sur les questions globales et à porter la voix du continent sur la scène internationale questionne directement le rêve des pères fondateurs. En témoigne le positionnement des pays africains lors des différents votes onusiens sur le conflit russo-ukrainien. Si une majorité d’États ont préféré la neutralité ou, à défaut de l’exprimer clairement, ont laissé leurs diplomates marquer une « pause-café » stratégique au moment des votes, respectant alors l’héritage non-aligné et anti-impérialiste des pères fondateurs, d’autres ont, quant à eux, pris l’option de condamner ou de soutenir l’un des deux camps, au grand dam des peuples, spoliés de leurs voix par des mécanismes insidieux d’achat de conscience ciblant leurs dirigeants.
Pas d’indépendance sans autonomie financière
Incarné par l’OUA depuis le 25 mai 1963, le panafricanisme institutionnel est aujourd’hui porté par l’UA. Mais l’organisation est aujourd’hui cooptée par des intérêts étrangers car n’ayant pas, ou ne se donnant pas, les moyens de sa politique. Sur le plan budgétaire, l’Union africaine dépend en effet de la contribution de bailleurs de fonds étrangers à hauteur de trois quarts de son budget total. Une dépendance financière qui conditionne son alignement, souvent autodestructeur, sur des positions géopolitiques directement antagonistes aux intérêts des État membres.
Ainsi, de l’aveu même de l’UA, « plus de 40 % des États membres ne versent pas leurs contributions annuelles à l’Organisation ». Suite au sommet de Kigali tenu en juillet 2017, ces derniers se sont accordés sur le prélèvement par l’organisation d’une taxe de 0.2% sur les importations du continent, afin de moins dépendre des partenaires internationaux. Toutefois, cette « décision de financement de Kigali » reste à ce jour au point mort. Or, une organisation panafricaine sans indépendance financière représente un sophisme, entre en contradiction directe avec la philosophie qu’elle porte.
Des institutions en déphasage avec les peuples
À cela s’ajoute l’enlisement de l’UA dans des dogmes philosophiques aux dépends du pragmatisme qu’appellent certaines situations comme l’injonction faite aux États sahéliens de Transition de tenir des élections, en jetant au passage des millions de dollars dans leur organisation, alors que les défis sécuritaires auxquels ils sont confrontés font de la lutte antiterroriste une priorité des finances publiques. Et pour ne rien arranger, les organisations sous-régionales comme la CEDEAO, émanations locales de l’UA, végètent dans les mêmes carcans.
Si le fédéralisme porté par Kwame Nkrumah reste en vie, il l’est seulement à travers un contre-projet sous-régional soutenu par les ambitions des régimes de Transition sahéliens, Mali et Burkina Faso en tête. Toutefois, c’est surtout via la société civile que le panafricanisme a continué à vivre, traverser les générations et influencer les politiques publiques, même si ce fut avec plus ou moins de succès, comme le mouvement du Front anti-CFA dont la mobilisation a accouché de la mise à l’agenda de l’Eco par la CEDEAO. Une réforme depuis dénoncée comme cosmétique et reléguée à 2027 par les décideurs politiques, soit comme une patate chaude aux calendes grecques.
Teria News