L’Afrique, ligne de vie de l’Iran contre l’Occident

Sous embargo, l’Iran multiplie les offensives diplomatiques en direction du continent africain. Le commerce entre l’Iran et l’Afrique a atteint 1 milliard 250 millions de dollars avec une croissance de 100% en 2022. Une stratégie visant à contourner les sanctions mais aussi à créer un axe de résistance anticolonial.

Depuis 2018 et la dénonciation par Donald Trump de l’accord sur le nucléaire iranien, Téhéran a, de nouveau, été relégué au ban des nations. Ephémère chef d’œuvre de la diplomatie Obama, l’espérance de vie du Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA), qui devait intégrer l’Iran au concert des nations, s’est peu ou prou alignée sur celle de la seconde administration Obama. Résultat, par crainte de tomber sur le coup des sanctions de Washington en vertu de l’extra territorialité du droit américain et malgré les tentatives européennes de sauver l’accord, les firmes multinationales ont aussitôt déserté l’Iran. Dès lors, en plus d’assumer l’enrichissement de son uranium, Téhéran, en proie à une crise économique majeure portée par une inflation record de 54%, cherche à alléger l’étau des sanctions étatsuniennes et a fait du continent africain une bouée de sauvetage.  

Partenariat économique et militaire

« Au cours des sept premiers mois de 1401 du calendrier iranien, 1 million 851 mille 911 tonnes de marchandises d’une valeur de 972 millions 969 mille 726 dollars ont été échangées entre l’Iran et les pays africains, dont 1 million 787 mille tonnes d’une valeur de 912 millions 100 mille 920 dollars représentaient la part des exportations de l’Iran vers 37 pays africains, et 65 mille 118 tonnes de marchandises d’une valeur de 60 millions 868 mille 806 dollars ont été importées de 20 pays africains »

Ruhollah Latifi, porte-parole d’Administration iranienne des douanes

Les échanges commerciaux entre l’Iran et l’Afrique (produits manufacturés, agricoles, hydrocarbures) ont bondit en l’espace d’un semestre (mars à septembre 2022) : 47,1 % de plus qu’au cours de la même période l’année précédente. Téhéran s’est arrimé aux moteurs de l’économie continentale : les échanges avec l’Afrique du Sud, premier partenaire commercial africain de l’Iran ont représenté 214,01 millions de dollars (+102,92 % en valeur), 145,44 millions de dollars pour le Mozambique et 194 721 tonnes (+ 162,86 % en valeur) avec le Nigeria, en troisième position.

Par ailleurs, le pays exporte également son armement. Ainsi, le 20 octobre, le département d’État américain déclarait que l’Iran avait fourni des drones de combat au gouvernement fédéral Éthiopien, en guerre contre des rebelles Tigréens depuis fin 2020.  

L’Afrique disputée par les puissances rivales du Moyen-Orient

La guerre d’influence « nouvelle génération » que se livrent les grandes puissances sur le continent africain en cache d’autres. En l’espèce, celle qui oppose l’Iran et ses voisins régionaux.

Tout comme son ennemi antisioniste, Israël multiplie les partenariats avec les pays africains pour soigner son image de pays colonisateur, notamment en vue de limiter le nombre de voix hostiles à sa politique dans les fora internationaux dont les Nations unies. L’État hébreux a, au grand dam de la république islamiste, remporté une victoire diplomatique sur son adversaire en obtenant le statut d’observateur de l’Union africaine en 2021.

Parallèlement, cette fois en termes d’influence religieuse, l’Iran, fer de lance de l’islam chiite, s’oppose également à l’Arabie Saoudite, garante du sunnisme, avec la construction de mosquées et centres culturels rivaux dans les pays africains.

Enfin, à l’ère d’un renouveau panafricaniste, soutenu par les aspirations souverainistes des jeunes générations sur le continent, l’influence de Téhéran en Afrique passe également par l’entretien d’une affinité idéologique entre les nationalismes africains émergents et l’anti-impérialisme iranien. La rencontre des deux pensées se veut ainsi la synthèse de la lutte anticoloniale du Sud global contre l’Occident.

Teria News

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