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Soudan : Le torchon brule entre Port Soudan et Abou Dhabi

15 diplomates émiratis expulsés du Soudan. Les Emirats Arabes Unis sont accusés par Port Soudan de soutenir les FSR du général Mohamed Hamdane Dagalo, désormais au contrôle de Khartoum. Alors que les pourparlers de Jeddah ont échoué, l’organisation sous-régionale Igad a, elle, obtenu une percée diplomatique : une rencontre entre Abdel Fattah al-Burhane et Hemedti.

Dans la guerre sans merci que se livrent les généraux soudanais depuis le 15 avril, certaines puissances régionales semblent avoir choisi leur camp. Si l’Egypte, puissance tutélaire du Soudan, a placé ses ressources en appui à Abdel Fattah al-Burhane, son rival lui, jouirait du soutien des Emirats Arabes Unis.

Chef des Forces de soutien rapide (FSR), groupe paramilitaire issu des redoutables milices arabes janjawid, créées pour réprimer la rébellion au Darfour sous Omar el-Béchir et à nouveau accusées de crimes de guerre dans le sud-ouest soudanais, Mohamed Hamdane Dagalo, entretient des relations notoirement privilégiées avec Abou Dhabi auquel il a fourni des mercenaires pour combattre au Yémen au sein de la coalition menée par l’Arabie Saoudite contre Sanaa. De plus, le général Hemedti est à la tête d’une immense fortune, issue de l’exploitation de mines d’or dont le produit est raffiné à Dubaï.

Le rôle des Emirats Arabes Unis dénoncé par Port Soudan

Depuis le déclenchement du conflit, le rôle des puissances régionales, Egypte et pays du Golfe, interroge. En août, le journal américain Wall Street Journal avait cité des responsables ougandais qui assuraient avoir trouvé des armes dans un avion-cargo censé transporter de l’aide humanitaire émiratie à des réfugiés soudanais au Tchad. Abou Dhabi avait aussitôt démenti.

Alors que le rapport de force entre le chef d’État soudanais et son ancien adjoint au sein du Conseil souverain de Transition ne penche encore, de façon décisive, en faveur d’aucun camp, les Emirats Arabes Unis sont sous le feu des critiques des généraux de l’armée régulière, mais aussi de manifestants accusant le pays d’être le principal soutien du général Hemedti. Dimanche 10 décembre, le ministère soudanais des Affaires étrangères à déclaré 15 diplomates émiratis persona non grata, donnant « 48 heures » à leur ambassade pour qu’ils « quittent le pays ».

Enlisement des combats et espoir diplomatique

Sur le terrain, et malgré la supériorité aérienne des forces loyalistes, les FSR résistent, au point de contraindre général al-Burhane à quitter Khartoum dont il a perdu le contrôle au profit de son rival, pour se relocaliser à Port Soudan, désormais capitale administrative du pays. Scindé en deux, la configuration du Soudan rappelle celle de la Libye écartelée entre deux légitimités politiques, l’une basée à l’est et l’autre à l’ouest du pays.

Victime de la multiplication des théâtres d’affrontement sur le globe et d’une dissémination des forces à la faveur de l’émergence d’un monde de plus en plus multipolaire, le conflit soudanais est relégué dans l’ordre des priorités des grandes puissances, comme des puissances régionales, en particulier depuis le 7 octobre. Depuis le 15 avril, « environ sept millions de personnes ont été déplacées, ce qui constitue le plus important déplacement au monde », affirme Clémentine Nkweta-Salami, coordonnatrice de l’action humanitaire de l’ONU au Soudan. Les Nations unies recensent également 12.000 morts, un chiffre sûrement en deçà de la réalité, tant des pans entiers du pays sont coupés du monde, selon la responsable.

Relancés Jeddah, les pourparlers conduits sous l’égide des États-Unis et de l’Arabie Saoudite n’ont pas porté les fruits escomptés, alors que les objectifs étaient limités à la conclusion d’un cessez-le-feu. Mais, parallèlement à la brouille diplomatique entre Port Soudan et Abou Dhabi, la journée de dimanche a également marqué une percée diplomatique, cette fois-ci sous l’égide de l’Igad. L’organisation sous-régionale est en effet parvenue à négocier une rencontre entre les deux belligérants. Publié à l’issue d’un sommet extraordinaire à Djibouti, le communiqué de l’institution régionale de la Corne de l’Afrique annonce une rencontre entre Abdel Fattah al-Burhane et Mohamed Hamdane Dagalo dans les deux prochaines semaines.

Teria News

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